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Indre 1914-1918 - Les 68, 90, 268 et 290e RI
20 mai 2013

L’Ercupération

LErcupération1

Quand qu’jétions au repos, j’allions queq’foués anc el gars d’Cérémounie vouer les séances du Conseil qu’cétait eune vraie erprésentation où que j’rigolions pu qu’au Guignol.

J’ons vu un jour un vieux Colon qui l’tait Préssident qu’avait trouès quat rangées ed décorations ed tout pays accrochées su les estoumacs. I disions qu’cétait  un grand ami d’eun huile lourde qui yavait proumis eune belle cravate ed commandeur à mette encore par là d’sus si v’lait seul’ment saquer les polus coume i faut.

V’la qu’entrant j’tombons jusse su neune drôle d’affaire. I avait par terre rin qu’des torchons, des caneçons, des ch’mises, des falzards, des vieux croquenots, qu’tu t’serais cru cheu l’père Lunette !

Ils ‘taient en train de juger un gars du Génie qui l’tait dans neune compagnie d’Ercupération et pis qui l’tait accusé d’avouer barbotté toutes ceux vieilles nippes qu’les polus avint balancées dans les foussés antour de ieux cantounnements.

L’commissaire rapporteur i eux aspliquait coumment qu’çà s’était passé.

Ct’animau là il espédiait à sa bourgeouèse tout c’qui pouvait ercupérer. Queuq’foués i f’sait des colis qui i envoyait, d’aut’foués i donnait çà à des copains qu’allint en parmission. Tant si ben qu’la bourgeouèse all’ avait monté un vrai magasin qu’a f’sait un coummerce d’enfer !

Seul’ment v’la la pip’lette qui dit tout l’tout à la polisse et pis l’coumissaire qui fait main basse su l’Saint frusquin et pis qu’en espédie un plein wagon où qu’j’étions pour qui seye jugé !

T’aurais ri d’entende lire les lettes qu’il écrivait à sa bourgeouèse c’châmeau là !

Ma chère Clémentine, qui i disait, j’t’envoué par le p’tit Alasimone qu’arrive en parmission un moulin à café qu’jons trouvé tous deux au fond d’eune cagnat. Le boué est ben sec ; aussi faura qu’tu l’trempes dans l’iau chaude pour qui s’gonfelle et pis tu frott’ras la manivelle anc du papier d’verre et pis tu y mettras du saindoux craint’ qu’a r’coummence à s’rouiller. J’on pas pu dégotter l’tirouer. J’bouérons tout d’même du bon café anprès la guerre. Oublies pas d’dounner un p’tit coup d’vin blanc au gars Alasimone pour la peine …

Anprès çà j’ons entendu les témoins.

L’pus réussi c’était l’coummandant d’la compagnie d’ercupération qu’est v’nu défende c’pouvère gars.

« Messieurs, qu’il a dit comme ça, v’avez guère fait un joli coup d’m’el fourer au bloc. C’était un houmme ben précieux. J’pouvons ben dire qu’il’tait à sa vraie place ! Dans c’te guerre, j’voyons des notaires qui cassont des cailloux su’l’bord des routes, des marchands d’cochons qui f’sont des écritures, des épiciers qui font les chefs ed’gare et pis c’est partout coumme çà ! C’est pas étounnant qu’çà marche si mal ! Ah ! n’en v’la un qui counnaissait ben son métier ! I r’cupérait à tour de bras ! I povait rin vouer traîner ; fallait qu’il ramasse. I m’a rapporté la s’maine darnière pus d’trouès cents kilogs d’vieilles bouètes ed singe. I r’cupérait à lui tout seul pus qu’toute la compagnie. J’i en veux pas parce qu’il a envoyé cheux lui toutes ceux frusques. Les autres i z’auraient laissé l’tout dans les foussés et pis c’était pardu pour tout le monde. Faut encore mieux qu’çà seye coumme çà. Tenez y a encore ben pus fort ! J’avions à la Compagnie un vieux canasson qu’avait tout les vices et pis qui s’tait tout esquinté les guibolles à force ed’ fout’ des coups d’pieds !

Eh ben c’gars là i n’en f’sait c’qui v’lait d’ce chti canasson. I sarvait aussi ben qu’en aute ! D’puis que c’gars là est au bloc j’ons du le faire abatte ! N’en v’la encore pour trouès mille balles ! Si j’continuons de c’train là, j’vons tout dret à la ruine. V’la un proucès qui coûte ben cher. J’vous d’mande ed l’acquitter et pis d’me l’erdounner au trot ! »

LErcupération2

 

Alors, v’la l’vieux colon qui s’met à rigoler que l’coummissaire du gouvarnement i savait pu qoué dire. L’pti sargent qui f’sait l’avocat il a pas eu grand peine à avouer l’acquittement.

Anprès l’Conseil, j’ons vu l’vieux colon qui s’en allait anc soun ordounnance qui marchait darrié lui et pis qui i portait toutes ses décorations dans neune serviette.

L’vieux pouvait pas marcher dans la rue anc toute c’te farblanterie su le vente qu’c’aurait fait pus de bruit qu’un troupeau de vaches anc ieux clochettes !

J’ons entendu dire que l’lendemain il ‘tait jusse tombé su l’général qui ‘tait guère content d’l’acquittement. Il a dit qu’si continuait coumme çà i pourrait ben s’bomber pour avouer autour du cou la cravate ed coummandeur !

Le souer venu j’ons vu l’gars du Génie qui montait en tranchées I z’avint ben trouvé l’moyen d’y faire perdre son filon !

Queuq’jours après j’ons appris qu’il ‘tait bouzillé !

A.P.

Amicale "Les Anciens de la 17ème DI" Bulletin n°8 1923

 

Si vous aimez ce style de texte, je ne peux que encourager à relire:

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8 mai 2013

Du 11 novembre au 8 mai

En novembre dernier, je faisais part du début de la saisie de ma liste des natifs du département.

Le 10 novembre dernier, j'amorçais mon fichier excel en moins d'une semaine, j'obtenai les fiches et une liste nominative de quelques 10.000 noms à partir des données du site Mémoires des Hommes, il ne me restait plus qu'à saisir les données.
Six mois plus tard, je viens de finir la saisie fiche par fiche et au final, j'obtiens une liste de 10.531 noms.

Capturenatifs

Que faire maintenant? Je m'en vais donc comparer cette liste avec les 11.767 noms obtenus gràce à la coopération de l'équipe du site Mémorial Gen Web

Rendez-vous dans 6 mois? J'espère que cela sera avant!

 

Petit rajout de fin d'après-midi:

Histoire de commencer le comparatif

CaptureComparatif

En jaune, c'est bon le nom est sur un (ou des) MAM de l'Indre.

En blanc, le nom est hors département, non retrouvé, ne figure sur aucun monument, est dans le fichier des non Morts pour la France, bref des recherches à faire (si le texte est en rouge, le MAM est retrouvé)

2 mai 2013

Henri GALLIEN, voyage sans retour jusqu'à Stenay.

Henri Jules GALLIEN est né le 25 juillet 1882, à Azay-le-Ferron, à 8 heures du matin dans la maison familiale, au lieu-dit "Fouillaumin". Il est le fils de Louis GALLIEN, 35 ans, qui exerce la la profession de colon, et de Marie BRAULT, 37 ans, sans profession.
Henri est le 5ème enfant d'une fratrie de cinq, tous nés à Azay-le-Ferron (36) :

  • Pierre, né en 1868,
  • Louise Joséphine, née le 26 juillet 1872,
  • Rose Silvine, née le 1er septembre 1875
  • Louis, né le 07 août 1879
  • Henri, né le 25 juillet 1982.

En 1894, Henri suit ses parents à Saint-Hippolyte (37), puis à Chambourg (37) en 1906.
Il est incorporé le 14 novembre 1903 comme soldat de 2ème classe dans le 68ème régiment d'infanterie, au Blanc (36), où il effectue son service militaire.

HenriGallien_Portrait1Henri Gallien, au Blanc, en 1904

 

Henri est de taille assez grande pour l'époque : 1,74 mètre, cheveux et sourcils châtains, yeux roux, nez long et visage ovale. Il est renvoyé dans ses foyers le 18 septembre 1904.
Le 20 juillet 1907, dans l'église Saint-Pierre de Perrusson (37), Henri épouse Mérine DELORME, née le 25 juin 1886 à Bossay (37).

 

EglisePerussonEglise Saint Pierre de Perusson (37)

Le 22 avril 1908 naît Robert, leur premier fils.
La famille emménage avec les parents d'Henri à "Bergeresse", commune d'Azay-sur-Indre, en 1911. Le 1er janvier 1912 naîtra Maurice.

Le 1er août 1914, mobilisation générale. Henri arrive au corps le 11 août 1914, au 68ème RI du Blanc, dans l'Indre, conformément aux indications de son fascicule de mobilisation.
Le 28 septembre 1914, il est blessé à la cuisse gauche et repart en renfort le 12 septembre 1915.

Photo militaire - Copie (1)Henri GALLIEN (X) et ses camarades, courant 1916

Le 5 mai 1916, il est porté disparu à la Cote 304, à Esnes (55). Il a, en réalité, été fait prisonnier. Il décède le 10 juin 1916 à l'hôpital de Stenay, des suites de « Blessures de guerre ».

 

StenayHopitalL'hôpital de Stenay

Les 2 enfants d'Henri et Mérine, furent reconnus pupilles de la Nation. Henri reçut à titre posthume la Médaille Militaire et la Croix de Guerre avec étoile de Bronze décernées le 15 septembre 1920.

Sur les circonstances de la capture, peu d'informations, on peut cependant l'imaginer en relisant le témoignage d'Albert Le Flohic (du 90e RI) qui fut fait prisonnier la veille à cette même Cote 304 :
.... Mais où sont donc les tranchées? Il n'y en a plus. Elles n'existent absolument plus. Elles ont été nivelées. Et le fil de fer? Disparu. Rien que des trous d'obus et des morts.
Partout, partout sur la pente des Allemands qui grouillent tellement ils sont nombreux.
Au dessus de tout cela un nuage de poussière et de fumée.
Clac, clac, clac ... des balles de mitrailleuses sifflent à nos oreilles. Les obus français commencent à arriver maintenant. Nous reconnaissons nos 75 mais malheureusement nous sommes à présent dans leur zone d'éclatement.
par bonds, d'un trou d'obus à un autre, nous avançons lentement. j'aperçois un camarade qui tombe en criant. Il vient d'être touché de plein front.
Maintenant, c'est au travers du barrage français que nous courons vers les arrières allemands.
Les 75 sifflent et éclatent rageusement. Les éclats volent et viennent s'abattre autour de nous.
On se croirait comme environnés d'oiseaux voletant, affolés au ras de terre.
Des blessés allemands s'en retournent vers l'arrière. Des Flammenwerfer galopent par équipe de
deux vers nos anciennes premières lignes.
les désinfecteurs projettent déjà leurs flots de grésil sur les morts et les flaques de sang.
Nous sautons des tranchées allemandes pleines de soldat de réserve. j'en compte trois ou quatre lignes.
Enfin nous arrivons dans un boyau qui conduit au P.C. d'un officier supérieur allemand. Les soldats allemands sont courtois et aimables à notre égard. Ils donnent de l'eau ou du café à ceux qui en réclament.
Je marche derrière Royné et de Sèze.
L'officier allemand interroge notre pauvre commandant d'une manière assez cavalière. ce dernier n'a pas grand'chose à raconter. Nos ennemis semblent d'ailleurs parfaitement renseignés et en savoir plus que nous.
Nous apprenons que nous allons être dirigés sur le camp de l'Etanche. Le soldat qui nous conduit parait un bon diable. Avant d'arriver à Dannevoux, au bord d'un clair ruisseau nous faisons la pause.
J'ai bu deux litres d'eau pour le moins tellement j'avais soif. J'ai sur moi un petit bidon d'eau de vie que je partage avec les camarades.
Nous traversons Dannevoux.
Sur notre route de nombreux convois d'artillerie et de pionniers. L'activité derrière le front allemand semble beaucoup moindre que chez nous.

A la nuit, nous arrivons à l'Etanche où l'on nous parque dans un enclos.
Grâce à ma connaissance de l'allemand, grâce surtout à la bonne volonté d'un Unteroffizier, je me procure un peu de pain.
il ne fait pas froid. Je m'assieds sur une vieille caisse et songe à tout ce qui vient de se passer.
Avons-nous fait notre possible ?
Oui, sans aucun doute.
Non, nous n'avons rien à nous reprocher car toute résistance eût été inutile et n'aurait eu pour résultat qu'un massacre des quelques survivants.
...

En relisant ce témoignage, il ne faut pas oublier que vraisemblablement, Henri fut évacué par les Allemands alors qu'il était blessé. On ose imaginer les souffrances vécues jusqu'au fatidique 10 juin.

Depuis cette époque, Henri Gallien est inhumé à Stenay. Dans le cimetière de cette ville, se trouve un ossuaire regroupant les corps de 183 soldats décédés en captivité, dans le secteur.
Parmi eux figure Henri Gallien.

Stenay_Carre1Le monument de l'ossuaire - cimetiere de Stenay
Photo acesar55 (Alain)

Il est à noter que le graveur lors de l'érection dudit monument fit une erreur sur la stèle ; celle-ci reporte le nom de Henri Gallier du 68e RI.

Stenay_Carre3Photo acesar55 (Alain)

 

 Merci à Mickael pour ses recherches et pour m'avoir ouvert ses archives familiales.

 

Sources :
Documentation de l'auteur.
Archives Mickael Chaffin
Cinquante après, par Albert Le Flohic, soldat de 1ère classe au 90e régiment d'infanterie (1967)

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