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Indre 1914-1918 - Les 68, 90, 268 et 290e RI
27 août 2019

2019 Un séjour en Flandres sur les traces de Lucien, Louis et Denis.

Voilà un article très important pour moi.

Le Centenaire 14-18 se termine et les flonflons mémoriels s’estompent. Cet été, pour la troisième fois, je me suis rendu en Belgique afin de continuer à découvrir le secteur d'Ypres. Il est bien évident qu’en quelques visites, il est difficile de s’imprégner de six mois de présence de nos soldats durant cet hiver 1914-1915. Les postes occupés sont nombreux, jamais bien loin les uns des autres, mais qui mériteraient chacun une étude à part entière (Brielen, Niewmolen, Brodseinde, Holebeke, Steenstraete, Zonnebeke …).

En 2006, profitant d’un séjour en famille à Ablain Saint Nazaire, en Artois, nous avions alors effectué une brève incursion à Ypres. C’était le temps de la découverte, ne sachant pas vraiment où fureter et se concentrant sur les éléments mémoriels principaux. La visite s’articula alors entre Saint Charles de Potyze, le musée Paschendaele de Zonnebecke et celui d’In Flanders Fields à Ypres.

Ablain_MireilleClement

En 2009 et en 2019, profitant d’un séjour à Waregem pour un festival de musique, le secteur étant non loin, deux visites furent programmées avec des thématiques plus précises. 2009 fut principalement la découverte du lieu de décès de Lucien, à savoir Brodseinde et plus précisément le secteur de l’ancienne voie ferrée de Zonnebeke vers Paschendaele, à l’ouest du carrefour de Brodseinde. Je vous propose donc ici de plutôt découvrir mon séjour yprois 2019 et le travail historique attenant. Le séjour de cet été, se décomposa en 2 parties, l’une liée à la trace mémorielle de Lucien, l’autre à celle de 2 soldats connus par les lecteurs de Indre1418, à savoir Louis Gallien et Denis Souchaud.

Commençons tout d’abord par le secteur de disparition de Lucien. En effet, un incident majeur de matériel informatique me fit perdre la quasi-totalité des clichés alors réalisés en 2009 et ce nouveau séjour, en 2019 fut l’occasion de réparer cet incident, mais aussi d’aller un peu plus loin.
Lorsque vous cherchez le secteur de combat de la 17e DI en ce début de mois de décembre 1914, il est un principe relativement simple: Il n’y a  quasiment aucune trace et il faut superposer les journaux de marche de l’époque et les monuments britanniques actuels. Sur place, rien ne rappelle le passage des troupes françaises. C’est ce qui d’ailleurs inspira Alex Deseynes pour le titre de son ouvrage écrit dans les années 80 autour de la présence française dans ce secteur. Il choisit alors de l’intituler « L’Hiver Oublié 1914-1915 » (« De vergete winter » en flamand). Au plus proche du lieu qui m’intéresse, on trouve un monument 9e corps d’Armée au carrefour de Brodseinde, mais il concerne les régiments du nord-ouest de la région militaire. Ce sont donc les 77 (Cholet), 114 (Saint-Maixent) et 135e RI (Angers) qui sont cités.

P1080250

Le positionnement du secteur de disparition est donc connu depuis 2009 et un report a déjà été effectué dans un message entièrement consacré à mon grand-oncle que je vous invite à lire (ou relire) :

3 décembre: A la recherche de Lucien porté disparu en 1914

Voici tout de même quelques clichés du secteur. Il s’agit là de la « Road to Paschendaele » de 1917. Pour s’y rendre, rien de plus simple. Il suffit de stationner sur le parking du « Tyne Cote Cemetery » et ensuite de descendre vers l’ancienne voie ferrée devenue maintenant piste cyclable. Ce point de départ est très important pour la compréhension des combats d’alors. Une fois dans le cimetière, en se rendant dans la partie basse, donc tournée vers Ypres, il est alors possible de visualiser l’importance de cette zone et la proximité d’Ypres. La vue englobe ainsi le clocher de Zonnebeke sur la gauche et surtout, les clochers d’Ypres en face. Au-delà de la cité flamande, il est aussi possible de voir les points culminants de la région et notamment le Mont-Kemmel.

Capture1

Avec toujours autant d’émotion, je découvris à nouveau le champ, l’ancienne ligne de chemin de fer aujourd’hui piste cyclable et le groupe de maisons vers lesquels se trouvait alors la 17e Cie du 290e RI et où elle subit une attaque allemande. En ce 3 décembre 1914, en ce lieu, se furent 17 tués, 65 blessés et 54 disparus qui furent inscrits au Journal de Marche et Opérations de l’unité.

« La situation devient de plus en plus critique pour la 17e Cie. Dans la soirée, 17h, le petit poste d’écoute placé dans une maison qui était à l’Est de la tranchée de la 17e Cie était surpris par les Allemands qui par des boyaux étaient arrivés jusqu’à quelques mètres de la maison.
Ce petit poste eut un homme fait prisonnier, le caporal et les autres soldats purent se réfugier dans les tranchées.
De cette maison les Allemands qui y étaient arrivés en nombre lancèrent des grenades et par des meurtrières rapidement fermées tiraient sur les occupants.
Cette situation dura toute la nuit malgré les efforts des hommes à la compagnie pour empêcher les Allemands de jeter des bombes et de tirer sur eux. Des bombes leur furent également lancées.
Malgré deux retours offensifs exécutés simultanément par une fraction du 68e, la 17e Cie et une section de la compagnie de réserve, il fut impossible de déloger l’ennemi.
Au jour, le Commandant de la Cie pour éviter les pertes qui se faisaient déjà sentir cruelles fit renforcer les pare-balles au moyen de sacs à distribution et même de havresacs et de toiles de tentes remplies de terre. Malgré ces efforts, les tirs d’enfilade très meurtriers empêchaient les hommes de relever la tête pour tirer.
Vers huit du matin, les Allemands réussissaient à sauter dans la tranchée entre le 68e et le 290e et profitaient d’une contre sape faite par le génie et aboutissant au point de liaison des deux compagnies, armés de boucliers et de bombes ils se ruent sur les hommes occupant la tranchée et, après une lutte qui dura plusieurs heures, se maintiennent entre le 68e et le 290e, prenant plutôt le terrain du 290e.
Le Commandant de la Cie fit faire un barrage, mais ce barrage n’empêchait pas l’ennemi d’enfiler les tranchées et de rendre la situation intenable.
Par une autre maison sise près de la voie ferrée, les Allemands opéraient le même mouvement.
Le Commandant de la Cie voyant qu’il allait être complètement cerné par sa droite et sa gauche fit évacuer la tranchée par le boyau de communication la reliant avec la 20e Cie d’une part, et le poste de commandement du chef de bataillon du 68e. Il était 10h30 environ.
Le Cdt la Cie et ses hommes se maintinrent dans ce boyau jusqu’à la nuit.
A minuit le 114e relève le 268e et la Cie du 290e qui sont au nord de la voie ferrée. »

Aujourd’hui, les maisons ont été reconstruites et les cultures ont repris leur place dans les champs de Flandres. Lucien et ses camarades y reposent à jamais.

P1080263

Cependant, avant de me rendre à Zonnebeke-Brodseinde, j’avais entrepris dès le premier jour de mon séjour en Belgique de me rendre à Steenstraete. Il me fallait voir Lizerne, le monument des victimes de l’attaque aux gaz et le secteur d’attaque d’avril 1915.

Lorsqu’on s’intéresse au parcours des régiments du département de l’Indre, il y eut une période particulière au printemps 1915. Pendant tout le conflit, les unités de réserve que sont les 268e et 290e suivirent leurs régiments d’active. Cependant, courant avril et mai 1915, ce ne fut pas le cas. La réserve fut séparée de l’active par un fait de guerre bien précis : L’usage massif pour la première fois des gaz de combats sur le front de l’Ouest. Depuis 1899, la convention de la Haye interdit l’usage des gaz asphyxiants ou toxiques. Durant l’année 1914, seuls des gaz lacrymogènes furent utilisés en conformité avec la convention. Le cap fut tout d’abord franchi avec l’usage d’obus toxiques, en janvier 1915, lors de la bataille de Bolimov (Pologne actuelle). Sur le front de l’Ouest, ce fut le 22 avril 1915 que l’armée allemande utilisa plus de 5000 bonbonnes de gaz chlorés au-devant des lignes des 45e DI et 87e DIT. Les troupes françaises perdirent pied et cela permit aux troupes allemandes d’occuper partiellement le terrain abandonné, malgré l’intervention des grenadiers belges et des troupes canadiennes stationnant à proximité. A partir de ce moment, l’état-major français rappela en urgence les troupes disponibles dont les 268e et 290e formant alors la 304e Brigade.

A l’instruction à Frévent, voici comment le chef de corps du 290e , le colonel Eggenspieler, appris la nouvelle du rappel en Belgique.

« (…) nous avons fait notre entrée à Frévent. C'était une gentille petite ville, avec des ressources de toute espèce, surtout en articles nécessaires au soldat. Il y avait de jolies maisons. Nous étions contents de nous voir dans une ville coquette. Le Général Curé nous a de nouveau recommandé de nous mettre en cantonnement large, il ne se doutait pas du tour que les Boches allaient nous jouer sur le canal de l'Yser.
En attendant nous nous sommes remis à l'instruction. Nous avons même organisé une Ecole de lancement de grenades.
Le lendemain de notre arrivée les deux bataillons étaient sur les routes, j'y étais moi-même pour les voir. Pendant que nous parcourions la campagne, une note arriva, qui prescrivit au régiment de se tenir prêt à embarquer. Une deuxième note qui arriva peu à près la première, me prescrivit de diriger de suite un bataillon sur Saint-Pol pour y être embarqué en chemin de fer. Enfin, une troisième note ordonna de porter tout le régiment sur Saint-Pol où il devait être embarqué à 17 heures. Il était 16 heures quand la troisième note arriva, et les bataillons étaient encore sur les routes. Il allait forcément y avoir du retard dans l'exécution de ces ordres. »

Au 268e, le capitaine Laurentin l’apprend ainsi :

« Nous étions bien tranquilles derrière Arras, le 9e Corps échelonné en profondeur du front jusqu’à nous, quatre autres corps à nos côtés dans la même formation. Sans rien savoir, nous supposions que le moment était venu de défoncer les lignes allemandes. Subitement, le 24 avril, à 17 heures, il a fallu boucler son sac à la hâte, courir à Frévent, s’embarquer parmi un encombrement de soldats et de canons, dès que les trains attendus entraient en gare ; puis, à peine débarqués à Enquelbacke (Esquelbeq), repartir en auto-camions pour Poperinghe, et enfin nous rendre à pied à Wipe Cabaret (Wippe, sud-ouest de Woesten), où nous bivouaquions le 25 au soir, dans un petit bois. Que sommes-nous venus faire ici ? Nul ne le sait … Des soldats isolés, des conducteurs d’autos, des employés du Génie, racontent que les Allemands ont passé l’Yser, qu’ils ont détruit plusieurs régiments par des nuages de gaz asphyxiants. Le canon gronde. »

La situation est telle que malgré les ordres reçus, le constat est que l’impréparation est constante. Les troupes présentes sont mélangées et la désorganisation règne.

Eggen_P189
Sources: Colonel Eggenspieler - Le 290e RI, un régiment de réserve du Berry.

 

« Après avoir franchi le Kemmelbeck, je suivais personnellement un chemin qui conduisait directement à Steenstraat par Lizerne. Je suis passé à un moment donné à côté d'un moulin qui était en flammes. Un peu au-delà du moulin je me suis arrêté dans une tranchée à droite du chemin. Comme je n'y voyais rien je suis passé de l'autre côté du chemin dans une tranchée occupée par des territoriaux tout contre Zuydschoote. Malgré que le terrain y fût plus élevé je n'y voyais toujours rien. Je ne savais pas ce qu'était devenu ma troupe. Je me décidai alors de me porter plus en avant sur une bosse de terrain au Sud de Lizerne. Je dois rappeler encore qu'avant d'arriver au moulin qui flambait, j'avais vu dans une ferme à gauche le Général Cherrier qui commandait la Brigade à notre droite. Il m'a fait connaître qu'il n'avait aucune mission offensive.
Dans mon déplacement vers le terrain au Sud de Lizerne, je fus suivi par mon Officier adjoint, le Lieutenant Sohier, et par toute la liaison. Dès le début nous dûmes marcher courbés et bientôt après il fallu ramper. Chemin faisant, je suis passé devant un sergent du Génie qui était assis par terre et qui se lamentait. Il était déchaussé et avait eu un pied traversé par une balle. Il avait une claie qui gisait à côté de lui. Il était chef d'une équipe de transporteurs de claies, qui devait établir des passages sur l'Yperlé, petit ruisseau qui précédait le canal de l'Yser. On pense si ces hommes avec leurs claies sur la tête étaient visibles. Du reste, on n'était pas près de le franchir, l'Yperlé. Le pauvre sergent était tout seul, il ne savait pas ce qu'étaient devenus ses hommes. »

Différentes attaques sont ordonnées, celle du 27 avril fit de nombreuses pertes aux 268e et 290:

« Arrivé au point où j'avais des vues sur le terrain au Sud de Lizerne, je me suis arrêté, couché dans l'herbe. Je voyais mes compagnies de tête arrêtées à côté des zouaves. La campagne était absolument vide. Aucune troupe n'était sortie nulle part pour attaquer. Etant donné la situation à Lizerne, elles avaient bien fait. Pendant tout le temps que j'étais couché à mon poste d'observation je voyais des hommes continuer à se porter en première ligne. Je me soulevais et leur criais de toutes mes forces de rester couchés. Ils ne voulaient rien entendre. Je les vois toujours courir de leurs petits pas menus, l'arme croisée devant le corps puis s'abattre, touchés par les balles des mitrailleuses. Pauvres garçons ! Que de morts inutiles, soit par manque d'instruction tactique, soit par une conception exagérée du devoir militaire. Quand je reportai mes regards vers le groupe Sohier, je vis le Lieutenant couché à terre et ramper vers un trou d'obus en se servant seulement de ses bras. J'en conclus qu'il était blessé aux jambes. J'interpellai le Maréchal des Logis Pothet qui, au lieu de me renseigner, me demanda si je n'étais pas blessé. Je lui dis que non. Puis je dus me recoucher et me faire extra-plat tellement les balles de mitrail leuses rasaient le tapis de près. Au bout d'un moment, je vis deux hommes, Blin, mon ordonnance, et Pothet porter le Lieutenant en avant vers la tranchée de tête. Je me disais aussitôt, ils vont se faire achever. En effet, au bout de quelques pas tout le groupe s'abattit sur le pré. Je ne sus que plus tard que Pothet avait reçu une balle dans le ventre, et Blin une dans le bras. Le Lieutenant ne fut plus touché. Il en avait assez de sa première blessure, une balle lui avait fracassé la cuisse. Bref, quand la fusillade et la canonnade se furent calmées, et que l'obscurité commençait à tomber, je me dégageai de ma position d'observation où j'ai fini par rester tout seul. Je n'eus d'autre ressource que d'aller à l'arrière à mon P.C. pour me reconstituer une nouvelle liaison.
Mon P.C. se trouvait dans une ferme plus avancée que celle du Général Cherrier. Mon personnel y occupait une cave pas bien propre. Le reste de la ferme était occupé par l'E.-M, du bataillon de zouaves de Lizerne. Les Officiers du bataillon ont été très accueillants, mais je n'ai pas pu savoir qu'elle était la situation du bataillon à Lizerne.
J'attendis le compte rendu du 6e bataillon qui s'était trouvé en tête du mouvement. Je me doutais que les pertes avaient dû être sérieuses. A la 23e, le Capitaine Marsily avait été tué. A la 24e, le Capitaine Beyler et le Lieutenant Ramez étaient blessés. J'avais donné des ordres pour qu'on m'avertisse quand les Officiers blessés passeraient devant la ferme. C'est ainsi que j'ai revu le Lieutenant Sohier. L'excellent garçon s'excusa d'être obligé de me quitter en pleine action. Le Capitaine Beyler avait conservé sa crânerie habituelle. Comme Sohier, il avait reçu une balle dans la jambe. Il a voulu donner l'exemple à ses jeunes gens, m'a-t-il dit. J'ai accompagné tous ces braves de mes vœux de prompt rétablissement. »

De son côté, au 268e, la situation est identique et l’impréparation se fait aussi sentir :

« Nous devons attaquer à 15h30. Il faut partir tout de suite. Je demande au général des agents de liaison pour nous montrer le cheminement : « On ne peut vous en donner qu’un, les autres ont des ordres à porter » Le colonel an tête, les compagnies homme par homme, nous suivons l’unique guide, qui parait affolé. Les obus éclatent devant nous avec fracas. Un officier d’artillerie, qui revient sans doute d’un observatoire, me montre un cheminement plus sûr. Nous faisons 800 mètres environ. Les balles commencent à siffler à nos oreilles ; nous arrivons à une ferme où des officiers de zouaves nous indiquent encore le chemin des premières lignes. Notre guide avait disparu. Sans eux, nous allions offrir aux Allemands une cible parfaite !
(…) Son poste est établi dans un bâtiment couvert en chaume. Du grenier, on peut découvrir, par les meurtrières faites dans le toit, toutes les lignes françaises et allemandes depuis Het-Sas jusqu’à Steenstraat. On suit parfaitement les sinuosités de la tranchée allemande, surtout lorsque le soleil éclaire les sacs de terre qui en forment le parapet. Dans le champ qui sépare les deux lignes, on aperçoit, de ci, de là, des terres remuées ; ce doivent être les postes d’écoute des Boches. Derrière leur tranchée et en face de notre poste, une maison semble faire pendant à la nôtre : « C’est la maison du collègue » dit le commandant. (Toutes les maisons ont reçu des noms qui permettent de les indiquer rapidement à l’artillerie).
Ce « collègue » boche règle bien malencontreusement le tir de ses batteries. Il est vrai que nous ne faisons guère mieux : C’est un sous-officier qui chez nous règle le tir en ce moment. Je ne le crois pas très fort. Il crie au téléphone « Parfait, très bien, continuez ! » J’aimerai mieux qu’il corrige les hausses, car le tir ne me parait pas réglé sur les tranchées que nous devons attaquer. (…)

D'abord affectés à la 152e DI, ils passent ensuite en support de la brigade Cherrier (brigade coloniale).
Après une tentative échouée, le 27 avril en direction de Lizerne, les deux unités indriennes attaquent à nouveau le 28 avril :

"L'artillerie devait commencer sa préparation à 14 heures. L'infanterie devait déboucher à 15 heures. Pour faire une bonne préparation, l'artillerie avait placé un Officier observateur dans la tranchée de départ. Il était relié aux batteries par un fil téléphonique.
A 14 heures, les batteries se mirent à taper avec vigueur sur les tranchées allemandes, sur Lizerne, et sur le chemin de Lizerne à Steenstraat. Elles canonnèrent également une grande bâtisse qui dominait tout le terrain au-delà de la route de Boesinghe, et qu'on appelait la Maison du Collègue.
Les Allemands ne ripostent pas pendant notre préparation, c'est-à-dire qu'ils ne font pas de contre-préparation sur nos tranchées, c'est leur tactique. Ils se réservent pour le moment où l'attaque débouchera. Ils envoient toutefois des obus de gros calibre en arrière de Zuydschoote où ils soupçonnent qu'il peut y avoir des rassemblements de troupes.
Je me suis établi dans la tranchée où j'étais la veille au sud-ouest de Zuydschoote. Les territoriaux occupent toujours la tranchée et je prends place parmi eux. Nous sommes fortement secoués par les gros obus qui n'éclatent pas, ou qui éclatent trop profondément. J'avais avec moi le sous-lieutenant Devilliers et un téléphoniste.
A 15 heures justes, le tir de notre artillerie s'arrête. Il s'établit un silence impressionnant, pendant lequel les Officiers suivis de leurs hommes sautent sur la route. Ceux qui ont le derrière trop lourd sont poussés par les zouaves. Et en avant, les vagues se précipitent vers les tranchées allemandes. Toutes les compagnies se portent en avant, même celles du 5e bataillon. Le spectacle est si beau, qu'un certain nombre de territoriaux qui gardent les tranchées partent aussi. Un sous-officier d'artillerie de liaison est empoigné également. Il lâche son appareil téléphonique et se précipite en avant. Il n'a pas d'arme, il cognera sur les Allemands à coups de poing et de pieds.
Les deux premières lignes de tranchées allemandes sont enlevées d'un seul élan. A la troisième ligne le tir de représailles allemand se déclenche. Les fusils, les mitrailleuses, le canon, tout crache à la fois. Une véritable nappe de balles passe sur la tranchée où je me tiens. De temps à autre je risque un coup d’œil. Impossible de rien distinguer de l'attaque. Tout le terrain était couvert d'une épaisse couche de fumée et de poussière. C'est dans cette atmosphère que se passent alors les combats singuliers qui se produisent à la fin des attaques d'ensemble. En fin de compte, sur les trois lignes enlevées nous en avons conservé deux. Et si nous n'avons pas gardé la troisième, et si nous ne sommes pas allés d'emblée jusqu'au canal, cela tient à ce qu'au Sud de Lizerne nous avons été seuls à sortir de nos tranchées. Comme la veille aucune troupe n'avait débouché, ni à droite, ni à gauche. Du côté de Lizerne nous avons continué à être pris d'enfilade par des mitrailleuses qui étaient restées dans la partie Est du village. Comme nous étions également découverts sur notre flanc droit, les Allemands sont revenus occuper les tranchées qu'ils avaient abandonnées.
En fin de combat, les deux compagnies de tête occupaient la deuxième ligne allemande, les deux compagnies suivantes la première, et les deux compagnies du 5e bataillon la tranchée de départ, autrement dit, la tranchée de première ligne française. Toutes les compagnies travaillèrent activement à organiser le terrain conquis. La 24e notamment creusa une tranchée à droite pour parer à toute attaque de flanc dans cette direction. Les mitrailleuses qui arrivent à leur tour sont mises en position sur les deux flancs.
Nos prises au cours de l'attaque furent de 87 prisonniers dont 2 Officiers. Les Allemands avaient abandonné de nombreuses armes dont 2 mitrailleuses. Pas mal de prisonniers s'étaient échappés par les deux ailes et n'avaient pas été dénombrés au compte du régiment, qui avait cependant été le seul à attaquer.
Vers 19 h. 30, un ordre de la Brigade prescrivit de poursuivre sans interruption l'attaque, pour rejeter définitivement au-delà du canal les Allemands qui paraissaient à bout. Si les Allemands étaient à bout nous ne l'étions pas moins. Sur 15 Officiers qui avaient pris part à l'attaque, 9 étaient hors de combat. Le Lieutenant Fougère avait été tué, les Sous-Lieutenants Tournier, Moinault, Poirier, Matignon étaient blessés. Le Sous-Lieutenant Tournier avait une blessure particulièrement grave. Une balle venue de côté lui avait emporté le menton. Des maîtres-chirurgiens ont réussi à le guérir longtemps après la guerre. Les compagnies du 6e bataillon qui avaient bien encore perdu 200 hommes étaient hors d'état de recommencer une nouvelle attaque, et les deux compagnies du 5e n'étaient pas suffisantes pour pousser jusqu'au canal. Pour avancer encore, il eût fallu que nous eussions les flancs couverts. Il eût surtout fallu qu'à gauche on nous débarrassât des damnées mitrailleuses de Lizerne. L'ordre de la Brigade recommandait une infiltration par petites attaques à la baïonnette plutôt qu'une opération en masse. Evidemment le Commandement après la première attaque n'avait plus les moyens d'en monter une deuxième. Pour finir, il n'y eût pas plus d'actions de détail que d'ensemble. Cela se produira encore plus d'une fois dans ce secteur".

Cependant, les témoignages publiés après le conflit permettent aussi parfois un accès à des données plus intimes, des scènes que les dépêches officielles, les Journaux de Marche et Opérations ne peuvent, ne veulent rendre compte. Un exemple au 290e RI par Marc Michon, alors adjudant et illustrant le désarroi des officiers de terrain vis-à-vis de la chaine de commandement et de ses exigences.

« Tout attaque est vraiment impossible » ne cessait de répéter le commandant Changeux en regagnant son P.C. « Jamais je n’ordonnerai un tel assaut, dussé-je y sacrifier ma carrière ». Je le vis si désespéré que je me permis de lui soumettre une proposition que j’exposai timidement, par bribes de phrases. « Chaque jour, dis-je, nous perdons au bataillon une trentaine d’hommes, tués ou blessés. Pourquoi dans le compte-rendu des vingt-quatre heures, ne pas attribuer ces pertes à l’assaut infructueux des deux compagnies contre les tranchées ennemies ? » « Mais c’est un faux ! » s’exclama le commandant. Comme je me taisais, au bout d’un moment, il reprit : « C’est bon, qu’il en soit ainsi. Préparez un compte-rendu dans le sens que vous indiquez ». Lorsqu’il l’eut signé, mon chef de bataillon s’engagea à vive allure dans le boyau qui conduisait à la première ligne. Comprenant ce qu’il se proposait de faire, je courus derrière lui et, le saisissant au collet, je réussis à l’empêcher de monter sur le parapet et de se faire tuer comme il en avait l’intention. Pas un mot ne fut prononcé, mais le regard que nous échangeâmes était chargé de tant d’émotion que nous détournâmes aussitôt la tête, l’un et l’autre. Le grade ne comptait plus, deux hommes étaient en présence.
Dans la soirée, lorsqu’il eut retrouvé son calme, le commandant Changeux vitupéra les états-majors qui faisaient tuer des soldats sans raison, sous le seul prétexte de maintenir élevé le moral des troupes … »

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Sources SHD_GR26N549 vol 5

Durant quelques temps encore et ce jusqu’en fin aout 1915, les 2 régiments indriens restent en secteur en Flandres. On les retrouvent le 2 mai 1915, ils subissent alors une attaque aux gaz vers Lizerne Boesinghe http://indre1418.canalblog.com/archives/2005/08/24/748818.html

En août 1915, le 290e revient en secteur entre Het Sas. Le 290ème RI reviendra en secteur entre Steenstraete et Het-sas entre les 17 et 24 août 1915 pour un ultime séjour avant de rejoindre les 68e et 90e RI du côté de l’Artois et d’Arras http://indre1418.canalblog.com/archives/2005/08/24/748818.html

Le résumé « graphique » de cette période dite « 2e Bataille d’Ypres » est détaillé dans l’ouvrage « Les Armées Françaises dans la Grande Guerre - Tome II ». L’ouvrage est consultable sur le site de la BNF Gallica https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62678327 En voici les 4 représentations que l’on trouve avec cet ouvrage et qui sont disponibles sur le site Mémoires des Hommes (AFGG) :

archives_SHDBG_Q_in4-000028-02-1-C_0028_2(1)

archives_SHDBG_Q_in4-000028-02-1-C_0029_2

archives_SHDBG_Q_in4-000028-02-1-C_0030_2

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Le Journal de Marche et Opérations du 268e RI nous permet de superbement illustrer cet épisode. Le capitaine Laurentin est alors l’adjoint au Lieutenant-Colonel MARIANI. Tous deux, sont arrivés du 77e RI au 268ème le 31 mars 1915. Le capitaine Laurentin, architecte dans le civil, est féru de photographie et dessine lui-même les cartes de l’unité. Le Journal de Marche du 268ème est ainsi très documenté et illustré.

SHDGR__GR_26_N_733__002__0065__T SHDGR__GR_26_N_733__002__0066__T
Sources SHD GR26N733 vol 2

Avant de nous intéresser à quelques cas individuels, voici donc quelques clichés actuels du secteur de ces attaques de la fin avril 1915. Si je n'ai pas eu le temps de tout parcourir, je reprends néanmoins des clichés via le site Googlemaps pour rendre compte. Je vous invite à cliquer sur certains clichés pour profiter d'une meilleure résolution.
A l’époque, l’arrivée en secteur se faisait depuis Woesten (Wippe) vers Lizerne. Actuellement, la route principale d’Ypres passe par Boesinghe et se rend à Steenstraate sans même passer dans Lizerne, qui est contourné. Dans la ligne droite avant Lizerne, la route occupe l’emplacement de l’ancienne première ligne.

P1080178

Sur la route de Lizerne à Steenstraete, le petit pont sur l’Yperlée. Le champ de bataille derrière et le clocher de Boesinghe à l’horizon

Capture2
Sources Googlemaps - SHD_GR26N549 vol 5 – historique allemand RIR125

Depuis les tranchées de départ en direction de l’Yperlée et du canal, la zone d’attaque au niveau de la « maison du collègue » (Voir clichés Laurentin)
Le JMO du 268e reporte : « Nos troupes font au pas de course les 300 mètres qui les séparent de la tranchée ennemie » Les 300 mètres correspondent à la lisière du champ de maïs en fond d’image.

ChampDeBataille_1
Sources Googlemaps

Dans les champs de culture, la zone de combat et l’Yperlée à la lisière du maïs non fauché. Le Canal correspond à la ligne d’arbres à l’horizon (Het-Sas à droite du cliché dans les arbres)

Capture3

Lizerne, inscrit à l’angle de la route. Arrivant sur place, la surprise de trouver ce fronton. Vision sur Steenstraete en fond d’image au centre en suivant la route. A noter la présence sur place d’une borne Vauthier, matérialisant la position du front en juillet 1918. Celui-ci n’avait donc pas changé depuis les premiers combats dans le secteur.

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Le monument de la réconciliation.

Ce monument a été érigé en 1961. Il fait suite au monument qui fut dynamité en 1941 par l’armée allemande. Il avait été originellement inauguré le 28 avril 1929 en présence du roi Albert I et du général Gouraud. Le monument d’origine était l’œuvre de Maxime Real del Sarte, à l’initiative des anciens combattants du 418e Régiment d’Infanterie.

MonumentSteenstraat2

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Les 268e et 290e Régiment d’Infanterie, ainsi que le 135e de Angers sont bien présents sur le monument de la Réconciliation.

Les inscriptions du monument:

 "ÉRIGÉ EN 1929 SUR L'INITIATIVE
DU 418ème RÉGIMENT D'INFANTERIE FRANÇAISE
LE MONUMENT AUX PREMIÈRES VICTIMES
DES GAZ ASPHYXIANTS
LANCÉS PAR LES ALLEMANDS LE 22 AVRIL 1915
A ÉTÉ DÉTRUIT PAR EUX EN 1942
LES ANCIENS COMBATTANTS BELGES ET FRANÇAIS
ONT EN SA PLACE DRESSÉ CETTE CROIX
AVEC UNE VOLONTÉ COMMUNE
DE RÉCONCILIATION ET DE PAIX DANS LE MONDE"

 

135ème 268ème 290ème 418ème RÉGIMENTS D'INFANTERIE - 1er MIXTE - GÉNIE ET ARTILLERIE DES 45ème 153ème D.I. ET 87ème D.I.T. - 2ème 4ème BATAILLONS DE CHASSEURS À PIED - 2ème BIS 3ème BIS 4ème 7ème 9ème ZOUAVES - 1er 3ème BATAILLONS D'INFANTERIE LÉGÈRE D'AFRIQUE - 73ème 74ème 76ème 79ème 80ème 101ème 102ème RÉGIMENTS D'INFANTERIE TERRITORIALE  -  1er TIRAILLEURS ALGÉRIENS

 

 GRENADIERS REGIMENT 1ste EN 2de KARABINIERS REGIMENTEN 3de EN 4de LINIEREGIMENTEN - GENIE EN ARTILLERIE DER 1ste EN 6de D.L.A. - ZWARE LEGER ARTILLERIE, GRENADIERS - 1er ET 2ème CARABINIERS - 3ème DE LIGNE - 4ème DE LIGNE - GÉNIE ET ARTILLERIE DES 1ère ET 6ème DIVISIONS - ARTILLERIE LOURDE DE L'ARMÉE

 

EMMANUEL LANCRENON CHANOINE TITULAIRE/HONORAIRE DE NOTRE DAME DE PARIS A CONÇU CE MONUMENT ET PRÉPARÉ SA RÉALISATION AVEC LES ARCHITECTES PAUL TOURNON MEMBRE DE L'INSTITUT ET DE L'ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE PIERRE DEVILLERS ET LES ENTREPRISES DELHEM - CAPPELIEZ - HENAUT. LA BRUGEOISE ET NIVELLES. UGINE GUEUGNON

 Après les présentations du secteur et du combat, il est un point qui m’est cher, c’est celui de l’hommage aux combattants. 2 d’entre eux ont fait déjà l’objet de messages sur le blog, je reprends donc ici certains de ces messages et les réactualise.

 

Louis Gallien

Louis GALLIEN est né le 6 août 1879 à Azay le Ferron (36) au lieu-dit Fouillaumin, il est le fils de Louis et de Marie Brault. Il est le 4ème enfant d’une fratrie de cinq.
Pierre né en 1868, Louise Joséphine née le 26 juillet 1872, Rose Silvine née le 1er septembre 1875, Louis né le 06 août 1879, Henri, né le 25 juillet 1982.
Lors de son service militaire et lors de périodes successives, Louis a un beau parcours :
Incorporé le 16 septembre 1900 comme soldat de 2ème classe au 32e R.I. Il est Caporal le 19 novembre 1901, puis Sergent le 27 septembre 1903 pour être renvoyé à la vie civile le 19 septembre 1903 et le 4 janvier 1910, il devient adjudant de réserve, il dépend toujours du 32e R.I. En 1904, alors qu’Henri est au service militaire, Louis se marie avec Hélène Bertrand le 3 octobre à Perrusson (37), il a alors 34 ans et exerce la profession de meunier à Chambourg (37).
En 1905, le 17 juillet, nait leur premier fils à Perrusson qu'ils appelleront Hubert Edmond Louis. Le 5 mars 1912, leur deuxième garçon Didier nait au Tanger (36).
Son registre matricule nous apporte pas mal de renseignements :
De taille assez grande 1m75, brun avec des yeux gris, un degrés instruction de niveau 3
En août 1914, il est mobilisé au sein du 268e R.I. du Blanc et suit le parcours du régiment jusque dans les Flandres, en avril 1915, où il tombe au combat. Le 22 avril 1915 donnera lieu à de terribles combats dans la région d’Ypres en Belgique, date à laquelle ont été utilisés les premiers gaz moutarde, ou aussi nommé parfois ypérite. A 17 heures, 180 tonnes de chlore seront libérées sur un front de 6 km. La mortalité des intoxiqués s’élèvera à 40% en avril 1915.
Le 268e R.I., avec le 290e, sont rappelés du nord de la France pour renforcer les lignes décimées de la région d’Ypres et afin de reprendre le terrain à l’ennemi.

https://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/fr/ark:/40699/m005239e9af2fa2d/5242bdd39f21e

 Voici les derniers moments de la vie de Louis transcrit dans le JMO du 268e RI:

"Les sections du sous-lieutenant Marcille et de l’adjudant Gallien pour le 268ème et la section Sueur, du 9ème zouave, sont désignées pour donner l’assaut à la baïonnette.
A 17h38, le tir d’artillerie commence ; il s’accélère à 17h57 et fait disparaître les tranchées allemandes dans une épaisse fumée.
A l’heure fixée, (18 heures), le capitaine Gire donne le signal. Tous les hommes bondissent, baïonnette haute, et se perdent dans la fumée des éclatements, tandis que l’artillerie allonge son tir.
Nos troupes font au pas de course les 300 mètres qui les séparent de la tranchée ennemie sans subir de pertes sérieuses ; mais arrivées près du parapet, elles sont reçues par une avalanche de bombes qui, instantanément, frappent mortellement le sous-lieutenant Marcille, l’adjudant Gallien, l’adjudant Chottin et une dizaine d’hommes. Les autres se terrent contre le parapet."

 Au 290e RI, Marc Michon insiste sur la fatidique distance à parcourir :

« Trois cents mètres à peine séparaient la tranchée ennemie de la nôtre. Passés maitres dans le placement des mitrailleuses, les Allemands avaient construit en face de nous de petits abris bétonnés et blindés d’où leur maxims, disposées en flanquement, balayaient tout le no man’, land, interdisant toute approche. Il était pratiquement impossible de sortir pendant le jour de nos tranchées sans être abattu ».

La sépulture de Louis n’est pas connue, il repose donc en Flandres, il figure cependant sur le monument aux morts de Clion et ses deux fils Hubert et Didier seront reconnus pupilles de la Nation le 6 juin 1918 à Châteauroux (36)
En 1920, Louis, tombé en avril 1915, reçu à titre posthume la Médaille Militaire et la Croix de Guerre avec étoile de bronze. Il lui fut attribué la citation suivante : "Adjudant courageux qui a fait vaillamment son devoir. Tombé glorieusement pour la France le 29 avril 1915 en Belgique "

 Ce message s’adresse à Mickael qui est particulièrement attaché à la mémoire de Henri et Louis, ses anciens. Il parcourt ainsi le champ de bataille et s’était rendu à Het-Sas, il y a quelques temps.

 Si la sépulture de Louis Gallien est actuellement inconnue, et sachant que Mickael la cherche depuis longtemps déjà, par l’intermédiaire des mises en ligne du Centenaire, notamment sur Europeanna1418, il est intéressant de signaler que celle du Sous-lieutenant Marcille est maintenant documentée, cela permet ainsi d’orienter des recherches futures pour envisager la position de celle l’adjudant Gallien si la dépouille de celui-ci a été relevée.
Je produis donc là, une rapide notice concernant le Sous-lieutenant Marcille
Sa fiche Mémoires des Hommes
https://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/fr/ark:/40699/m005239f5c8696ae/5242bf1c28008

 MARCILLE André Oscar est né le 23 janvier 1882 à Saint Maixent (Deux-Sèvres)
Engagé volontaire au 32e RI à Tours le 26 février 1900, il s’engage pour 4 ans. Nommé sergent, il se rengage en 1904. Rappelé mobilisé le 6 août 1914, il passe Adjudant le 1er septembre 1914 et est nommé sous-lieutenant à titre temporaire le 1e mars 1915.
Sa fiche matricule ne mentionne à aucun moment son affectation au 268e RI. Sa première apparition dans le Journal de Marche du 268e concerne l’ordre de bataille du 15 mars 1915 où il est dit affecté à la 20e Cie du Capitaine
GIRE avec les Sous-lieutenants PROVOST et MULO.

Grace aux numérisations il est possible, via Europeanna 1418 de retrouver des documents concernant André Marcille et grâce à un dépôt effectué aux Archives Départementales de la Seine Maritime. On trouve ainsi un portait en pied de son passage au 114e RI. Une lettre du général Dubois (Chef du 9e Corps d’Armée), aussi disponible sur Europeanna 1418 confirme cette affection au 114e avant sa nouvelle affectation au 268e RI.

 

 

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Portrait d'André Marcille -
https://www.europeana.eu/portal/record/2020601/contributions_20287_attachments_229550.html
Europeana 1914-1918. CC BY-SA - http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/

 

Il est cependant un document encore plus important concernant André Marcille et donc indirectement Louis Gallien.

Il y a quelques mois, furent mis en ligne des documents complémentaires, qu’il m’a été impossible de retrouver au moment de la rédaction de cet article (Je les mets ici en ligne, et les retirerait si les ayants-droits se manifestent et souhaite leur retrait) Ainsi donc, une lettre envoyée entre Alice la femme de André Marcille et son frère. Ce dernier est sur le front et se rend sur la sépulture de son beau-frère pour lui rendre un pieux hommage.
Le point certainement le plus important et le schéma accompagnant ces échanges. En effet, celui-ci produit une photo de sépulture et un schéma de la position de la sépulture du sous-lieutenant Marcille.

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Aujourd’hui, un carré militaire français est toujours présent au sein du cimetière de Woesten, cependant la position des sépultures du schéma laisse présager un déplacement où un rapatriement au pays des dépouilles dans les années 20.

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Sources GoogleMaps

La sépulture de Louis Gallien n’a pas été trouvée, mais une pièce supplémentaire est maintenant connue et la recherche continue.

Denis SOUCHAUD

https://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/fr/ark:/40699/m005239fc7e4b5b6/5242bfe230c69

 Après Louis Gallien, il est un deuxième soldat qui a déjà eu l’honneur des recherches sur Indre1418. Voici donc Denis Souchaud dont j’ai présenté la fratie des 4 frères Souchaud, ces dernières années. La famille Souchaud, d'Adriers, envoya en effet trois fils au sein du 268e et un autre au 68e.

Denis SOUCHAUD est natif d’Adriers, dans la Vienne (86). Il est le fils de Louis et de Marie MICHARDIERE, qui le mit au monde à la ferme familiale de Baguérand, le 27 mai 1880.
De la classe 1900, il a le numéro 55 du tirage dans son canton « Isles jourdain », et est déclaré « Bon pour le service armé ». Cependant son père étant décédé en 1894 et étant l’ainé, il est dispensé de deux ans (service militaire de 3 ans), incorporé à compter du 14 novembre 1901 en tant que soldat de 2ème classe au 68e régiment d’infanterie du Blanc, il est envoyé dans la disponibilité le 20 septembre 1902.
Sa fiche matricule le décrit comme ayant cheveux et sourcils bruns, yeux gris, front ordinaire, nez large, bouche moyenne, menton rond, visage ovale. Sa taille est de 1m69.
En 1903, il se marie avec VIGNIER Louise qui en a, alors, 16. En 1905, nait leur premier enfant Ernest, trois autres garçons naitront dans les années qui suivront.
Toute la famille, même la mère, les frères et les sœurs de Denis vécurent ensuite à Baguérand, aux Adriers.
Le 1er octobre 1904, il passe dans la réserve et accomplira ensuite 2 périodes d’exercices (1907 et 1910) toujours au sein du 68è régiment d’infanterie du Blanc.

Mobilisable, il rejoint le corps le 31 aout. En septembre 1914, il passe dans l’armée territoriale ( père de 4 enfants) dans le 66e régiment d’infanterie territorial, cependant dû à son âge (34 ans), il est envoyé dans la réserve de l’armée active ( 268e régiment d’infanterie) comme beaucoup de jeunes soldats de l’armée territoriale.
Le 1er novembre 1914, il part pour le front et rejoint le 268e régiment d’infanterie, en Belgique, dans les Flandres plus exactement.
Fin avril, le 268e RI est intervenu dans le secteur Steenstraat, Het-Sas, Lizerne où il essaye de contenir les unités allemandes suite à la première attaque aux gaz du 22 avril 1915. Survivant à ces combats, alors que le front c'est quelque peu stabilisé, le régiment part en secteur au Pont des Péniches, au nord d'Ypres. Le 4 mai, le régiment est placé en réserve au pont des Péniches, le long du canal de l'Yser.

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Sources Googlemaps - SHD_GR26N549 vol 5

Le JM0 du 268e RI indique :
"Dans la nuit, le 5e Bon rejoint le 6e Bon au Pont des Péniches pour relever le 77e sur ses positions de réserves de 2ème ligne – rive Est du canal. Ces différents mouvements s’exécutent sans incident. Dans la journée, le 6e Bon avait subi un bombardement lui causant quelques pertes."

Denis Souchaud fait partie des victimes d’un bombardement allemand qui a frappé le 6ème bataillon du 268e régiment, avec le soldat Alexis Pagnard

Alors qu’il venait de survivre à un long hiver, était sorti indemne des attaques de 27 au 29 avril 1915, dans le secteur de Steenstraat, il succomba des suites des blessures liées au bombardement.
Ce même jour, la 304e brigade dont faisait partie le 268e RI, recevait les félicitations du général Curé, chef du 9e corps d'Armée pour le comportement des troupes qui quittaient enfin le secteur, malheureusement trop tard pour Denis Souchaud.

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Sources SHD GR26N549 vol 5

La préparation de cet article m’a permis de me repencher sur mes anciens albums et de retrouver ces 2 clichés pris par un officier du 290e RI et montrant une scène de repos de l’unité. Ces clichés qui furent pris à environ un kilomètre du Pont des Péniches, à la tête du canal, à Ypres.

 

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Sources GoogleMaps

La rambarde en fonte située au coin du canal est toujours présente ainsi que le bâtiment du moulin Vandoorne (largement remanié).

Voilà le bilan de mon court séjour en Flandres.

Je remercie de nouveau Mireille qui, à chaque voyage, a su se montrer patiente et compréhensive.
Merci à Kévin, merci à Mickael pour leurs documentations et informations.
Merci à Stephan pour la piste du sous-lieutenant Marcille aux AD76.

Merci à vous tous de votre audience

Je ne peux dire que je retournerai sur les lieux, peut-être est-il temps après les Flandres et l'Artois de découvrir un autre théâtre d'opérations des régiments indriens. Je ne sais pas encore répondre à cette question.


En cet été 2019 pour un festival à Waregem en Belgique, j'ai eu ainsi l'occasion de découvrir le superbe cimetière militaire américain de Waregem. En voici quelques clichés:

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P1080292

 

 

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Commentaires
A
Bonjour Jérôme,<br /> <br /> Merci pour cet article ! J'espère que nous aurons l'occasion d'en lire encore beaucoup d'autres ! Bonne continuation à toi,<br /> <br /> Bien amicalement,<br /> <br /> Denis
Répondre
H
merci Jerome<br /> <br /> <br /> <br /> que dire !!!!!!<br /> <br /> <br /> <br /> C H A P E A U xxxx comme dab <br /> <br /> <br /> <br /> allez 'les fans' on continue.<br /> <br /> <br /> <br /> bises
Répondre
J
Merci Jérôme: Riche en informations, une lecture très agréable, beaucoup de sensibilité et d’émotion.
Répondre
C
bonjour jerome<br /> <br /> tres beau récit merci<br /> <br /> cordialement<br /> <br /> cristian
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