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Indre 1914-1918 - Les 68, 90, 268 et 290e RI
18 mars 2021

1.707 retours de corps en Bas-berry, il y a 100 ans (2013 Réactualisation 2021)

17, 18, 19 mars 1921. Voilà une période bien particulière, nous en fêtons le centenaire en ce moment. Ces dates sont à retenir, car elles correspondent aux dates de l’arrivée du premier convoi officiel de « retours de corps » depuis les différents champ de bataille.
Au fil des décès, au fil du conflit, certaines dépouilles avaient effectué le voyage de retour au pays, mais cela supposait un décès en dehors de la Zone des Armées, bien souvent dans un hôpital bien loin du front. Seulement dans ces cas, les familles avaient l’autorisation de rapatrier le corps du défunt et ce à leurs frais.
Ces retours de corps restent difficiles à appréhender et à détecter, en l’absence de sources fiables, qui auraient permis une comptabilité précise.

Or en avril 2013, sur les conseils de M. Lacour de Châteauroux, j’entrepris de dépouiller et saisir en base de données les 1707 retours de corps officiels qui eurent lieu tout au long des années 1921 et 1922.
En effet, sous la pression des politiques locaux, aux mêmes sous la pression des familles, l'Etat autorisa le retour des corps des défunts, depuis le front jusqu'aux communes des familles. Cette prise en charge était effectuée par l'Etat, à la demande des familles. Les frais engendrés étant à la charge de l’Etat, des factures sont envoyées à la préfecture afin de remboursements, tant des frais engagés par les communes ou par les intermédiaires.

Pour comprendre cette opération logistique de grande envergure, je vous conseille la lecture de "Corps perdus, corps retrouvés. Trois exemples de deuils de guerre". de Stéphane Audouin Rouzeau In: Annales. Histoire, Sciences Sociales, 55e année, N. 1, 2000. pp. 47-71.

Mais aussi de cet article :

Le transfert des corps des militaires de la Grande Guerre Par alain-raoul (15/12/2015)

Dans le cas du département de l'Indre, les transferts s'effectuèrent sur les 2 années 1921 et 1922. Le premier convoi est parti en date du 16 mars 1921 et le dernier en date du 27 décembre 1922. Ce ne sont pas moins de 1707 corps qui revinrent ainsi dans le département, par le biais de 74 convois. On trouve dans ces dossiers, une foultitude de mentions intéressantes (adresse familles, horaires des trains locaux, fiches de coût de prise en charge par les autorités locales, demandes de renseignements par des familles, ...)

Revenons donc à la date du 17 mars 1921. Cette date correspond à l’arrivée dans le département d’un convoi en provenance de la Gare de Répartition de Creil (Oise). Ce convoi d’abord à destination de la gare régionale de répartition de Vierzon et qui, à partir de là, se dirige vers Châteauroux et ce afin d’y arriver le 17 mars 1921 à 13h41. Ce sont donc 68 cercueils qui arrivèrent à la gare « Paris-Orléans » de Châteauroux. Une fois arrivés, les cercueils sont transbordés vers les différentes lignes locales, afin d’arriver dans les communes de destination des cercueils, à la demande des familles.

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Azay le Ferron (1), Argenton (4), Ardentes (1), Ambrault (1), Arthon (1), Baraize (1), Chabris (1), Cluis (1), Chatillon (1), Chitray (1), Chasseneuil (2), Châteauroux (5), Chantôme (1), Chaillac (2), Déols (1, Diors (1), Eguzon (1), Gargilesse (1), Issoudun (2), Lureuil (1), Lingé (1), Le Blanc (2), Levroux (1), Le Péchereau (1), La Berthenoux (1), La Châtre (1), Lourdoueix-Saint-Pierre (1), Le Pin (1), Méasnes (1), Mézières-en-Brenne (2), Moulins-sur-Céphons (1), Neuillay-les-Bois (1), Neuvy-Pailloux (1), Neuvy-Saint-Sépulchre (2), Orsennes (1), Orville (1), Préaux (1), Reuilly (2), Sazeray (1), Sainte-Lizaigne (1), Saint-Marcel (1), Sainte Sévère (1), Sainte-Gemme (1), Saint Hilaire (1), Saint-Benoit-du-Sault (1), Tournon-Saint-Martin (1), Thizay (1), Thenay (1), Vicq-sur-Nahon (2), Vatan (1), Villentrois (1), Vineuil (1), Villedieu (1).

Toute cette liste de communes destinatrices des dépouilles ne présage pas de la gare de destination suite au transbordement. Ainsi, les cercueils à destination de Gargilesse et du Pin sont envoyés à la gare du Menoux.  Dans le même ordre d’idée, à la gare de La Châtre sont affectés le cercueil à destination de La Châtre mais aussi celui à destination de La Berthenoux.

Les communes de Lourdoueix-Saint-Pierre et Méasnes, bien que situées dans la Creuse, font l’objet d’un transbordement à Châteauroux avec transfert vers la gare d’Aigurande. 

De Châteauroux nous avons donc 5 départs dans 5 directions qui sont prévus :

  • En direction de Limoges, train n°1903 du 19 mars 1921 à 4h05 – 24 cercueils, 11 wagons (gares d’Eguzon, Argenton, Chitray, Le Menoux, Le Péchereau, Cluis, Tournon-Saint-Martin, Saint-Gaultier, Le Blanc, Chabenet, Saint Hilaire)
  • En direction de Vierzon, train n°1854 du 19 mars à 5h34 – 10 cercueils, 5 wagons (Reuilly, Sainte-Lizaigne, Issoudun, Neuvy-Pailloux, Montierchaume)
  • En direction de Tours, train 788 du 18 mars à 6h15 – 11 cercueils, 3 wagons (Vendoeuvres, Buzançais, Saint Michel-en-Brenne, Lingé, Ecueillé, Chatillon, Villedieu)
  • En direction de Montluçon, train 2261 du 19 mars à 6h15 – 10 cercueils, 5 wagons (Champillet, Urciers, La Châtre, Aigurande, Neuvy-Saint-Sépulchre, Ardentes)
  • A destination de Châteauroux (en local ou transit) – 13 cercueils, 5 wagons (Valençay, Vicq-sur Nahon, Moulins-sur-Céphons, Levroux, Vineuil). Les destinations vers Châteauroux, Arthon et Déols induisent un transfert local sans moyens de transport par chemin de fer.

 Ces listes sont accompagnées de divers papiers liés à l’activité préfectorale et sont ainsi stockées aux Archives Départementales. En effet, l’Etat prenant en charge les frais engendrés, on trouve ainsi des états de dépenses communaux qui sont envoyés à la préfecture pour remboursement. A titre d’exemple, nous trouvons pour la commune d’Argenton, un « Relevé des sommes dues aux manutentionnaires ayant effectué à Argenton, le transbordement du réseau P.O. sur le réseau des tramways, des cercueils contenant les restes des militaires « Morts pour la France » et restitués à leurs familles».

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A partir de là, au moment de l’arrivée en gare, les cercueils sont pris en charge par la commune et les familles pour ensuite une inhumation au cimetière communal. Dans ces journaux, Raymond Rollinat note en date du 19 mars 1921, « Obsèques des soldats Varaillon, Demay, Petit et Dubois, tués à l’ennemi. Argenton, gare et cimetière » De là, il prend une série de (clichés ayant trait aux cérémonies).


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Voici donc, par communes, la liste des corps rapatriés dans le département. Je reste bien évidemment à votre disposition pour de plus amples renseignements.

Sources: Archives départementales Indre 791W118 à 120

 Pour des raisons de lisibilité du message, j'ai enlevé la (trop) longue liste et mis à dispo mon fichier. Pour visualiser ce fichier excel complet (feuille protégée):

cliquez -> Classeur_RetourCorps_VersionBlog

Avant d'entamer la liste: quelques explications supplémentaires, pour les statisticiens :-)

A la question souvent posée concernant les pourcentages et les données départementales, voici quelques chiffres que je vous laisse malaxer:

  • Recensement de 1911: 287.673 habitants dans l'Indre
  • Classes 1878-1919 (classes mobilisées pendant le conflit): 141.771 Fiches matricules (mais pas tous mobilisés)
  • Sur les monuments aux morts: 11.646 noms mais la disparité des noms, les doublons, les manques laissent présager un chiffre à relativiser
  • Dans les fiches MDH: 10601 fiches de natifs du 36, mais seulement 9.682 fiches ont un recrutement "Chateauroux + Le Blanc".Et oui, l'exode rural (vers Paris notamment) était déjà d'actualité.
  • Il y a certainement eu d'autres retours de corps, mais combien?
    Concernant ceux-ci, il est à noter que de nombreux cas rencontrés correspondent à des décès dans des hôpitaux de l'arrière. La famille eut donc la possibilité de rapatriement du corps sans en passer par la voie ministérielle.

Donc si je vois large: 1700 retours de corps pour environ 11 à 12000 tués soit environ 15% et c'est un minimum.

En 2019, suite à un collectage de pas moins de 8000 clichés (Merci notamment à Alain Bréjaud et Huguette Mauduit) un recensement des sépultures et des lieux de mémoire sur le territoire national est entamé. A la date du 31/04/2019, pas moins de 6200 sépultures ou lieux de mémoire étaient recensés au niveau national puisqu'incluant les sépultures en nécropoles nationales.

100 ans après, une sépulture berrichonnne quasi oubliée (collection de l'auteur)

Sep2018

 

 

 

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