"Les Officiers.
D'après le souvenir qui m'en reste, le premier officier que je vis était le Capitaine Marsily, qui dans la matinée avait fait le cantonnement du régiment. Je vis ensuite les officiers de l'Etat-major du régiment, le Lieutenant Sohier et le sous-lieutenant Devilliers. Ils avaient fait tous deux la campagne depuis le début, ce qui était précieux pour moi. Le Lieutenant Sohier était mon officier adjoint. Il avait toutes les qualités requises; pour ces délicates fonctions. Il rédigeait les ordres et les comptes rendus comme un véritable officier d'Etat-major. Le sous-lieutenant Devilrers était beaucoup plus jeune que son camarade Sohier. Il était chargé des fonctions de porte-drapeau. En réalité, il faisait sa part des travaux de bureau.
J'entrais ensuite en relation avec les chefs de service. Le premier que j'ai vu était je crois le Lieutenant Patureau-Mirand, un Berrichon de vieille date. Il aimait passionnément son régiment. Il connaissait tous les soldats, au moins ceux originaires du pays. Par son âge il aurait pu rester à l'intérieur. Il n'en a rien fait. Il tenait à suivre son régiment en campagne. Il avait un excellent moral. Dans la dernière année de la campagne il tenait absolument à prendre le commandement d'une unité combattante, jusque là il avait rempli les fonctions d'officier de détail.
J'ai fait connaissance ensuite avec le Lieutenant Maître. Il était officier d'approvisionnement. C'était un grand et solide gaillard, respirant la santé. Parisien d'origine, il était toujours prêt à la blague. Dans son service il était débrouillard comme pas un. Quand personne n'était ravitaillé, le 290e avait sa pitance. Il avait ses méthodes à lui, qui étonnaient les fonctionnaires de l'Intendance.
Le Médecin-Chef était le Docteur Rosenthal. Il était sympathique quoique d'un abord froid, qu'il devait peut-être à son origine nancéienne. Il était plein de sollicitude pour les vieux Poilus du régiment. Il est passé par la suite au 114e où il a eu son quatrième galon ainsi que la Croix.
Il me reste à dire un mot des deux Chefs de bataillon. Celui du 5e bataillon était le Commandant Renard qui, avant mon arrivée, exerçait le commandement du régiment. Il était grand et bien taillé. Avec sa barbe en fleuve il avait un aspect imposant. Il était en campagne depuis le début.
Le 6e bataillon était commandé par le Commandant Mercier de Lacombe. Incomplètement guéri de sa blessure du mois de novembre précédent, il venait de rejoindre le régiment à Wlamertinghe peu après moi. C'était un Chef de bataillon tout jeune sur lequel je pouvais compter en toutes circonstances. Il était apte à se tirer d'embarras dans n'importe quelle situation. Il était regrettable qu'une nouvelle blessure grave reçue à la fin de 1915 l'ait mis dans l'obligation de quitter la troupe.
Je ne parlerai pas en détail de chacun des officiers de compagnie. J'ai fait leur connaissance petit à petit, dans les tranchées et au cantonnement. Il y en avait de jeunes et de vieux. Trois étaient officiers de carrière, les Capitaines Beyler, Beauclin et Collet. Tous les autres étaient officiers de réserve. Tous connaissaient parfaitement leur métier et étaient pour moi d'excellents collaborateurs".
Sources: Eggenspieler "Un régiment de réserve en Berry - Le 290eRI" Bourdier 1932