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Indre 1914-1918 - Les 68, 90, 268 et 290e RI

27 mai 2005

Quinze grammes, Jean Arbousset, brancardier honoraire du 290e

Parfois aussi, les poètes montent en ligne, affronter la dure réalité, le 290e RI en croisa un, voici ce qu'en rapporte le colonelEggenspieler:

En faisant l'historique de notre séjour dans la Somme et dans l'Aisne, je dois une mention à un brave petit sapeur qui vivait près de nous et qui avait une affection toute particulière pour le régiment. On l'appelait « Quinze-Grammes » en raison de son petit corps menu et fluet. Quand la guerre éclata, il venait d'être reçu à Normale Supérieure. Il n'hésita pas, et s'engagea dans l'arme du Génie, il avait 19ans. Quand en 1916, dans la Somme, il fit connaissance avec le 290e, ilregretta d'être entré dans la sape. Il demanda à passer au régiment. Il était à ce moment aspirant. Inutile de dire que sa demande fut très mal accueillie par ses supérieurs qui n'avaient jamais vu un sapeur demander à passer dans l'infanterie. « Quinze-Grammes », de son vrai nom, Jean Arbousset, dut donc rester sapeur. Il demanda comme compensation d'être nommé soldat de 2e classe honoraire au 290e. Je lui accordai volontiers ce titre. Tout en trimant avec ses sapeurs au poste de secours du 290e dont il était aussi brancardier honoraire, « Quinze-Grammes » rimait avec ardeur jusque sous les obus. Il a composé d'innombrables poèmes de tous les genres. Il était patronné à l'intérieur par des hommes de lettres de grand renom. Je reproduis ci-après le texte du « Cheval mort » qu'il m'a dédié en reconnaissance de sa nomination à titre honoraire au 290e.
Arbousset était un grand ami du Docteur Dureuil-Chambardel qui avait des goûts très littéraires. Le docteur a consacré à son petit ami un article très sympathique dans le numéro du 15 novembre 1919 de la Gazette médicale du Centre.

Le Pauvre Arbousset fut tué le 9 juin 1918 à la tête de sa section à Saint-Maur dans l'Oise. C'était un jeune talent de plus qui disparaissait.

 

LE CHEVAL MORT
Au colonel Eggenspieler avec toute la respectueuse sympathie d'un sapeur qui aime le 290e.
ARBOUSSET, Mars 1917.

 

Dans la boue et dans le sang
sur la terre grise,
un vieux cheval agonise
et lance à chaque passant
l'appel désespéré d'un regard impuissant,
            d
ans la boue et dans le sang,
          sur la terre grise.


Il se raidit, mais aussi
par instants frissonne.
Comme des feuilles d'automne
au vol triste et imprécis
il pleut des souvenirs sur son cœur endurci.
           il se raidit, mais aussi
           par instants frissonne.

C'est le pays, l'ancien temps
et c'est la lumière,
les rêves sur la litière
chaude, et le hennissement
tout de joie et d'amour, des lointaines juments
           c'est le pays, l'ancien temps,
           et c'est la lumière

Le pauvre cheval est mort
dans sa mare rouge.
Voici. la nuit. Rien ne bouge
ainsi, quand fuit l'astre d'or
plus d'un soldat appelle et puis rêve et s'endort,
        comme le vieux cheval, mort
          dans sa mare rouge. 

 

QUINZE-GRAMMES.
Cimetière de Combles, novembre 1916.

La danse macabre

"Au milieu des plaines et sur les collines
En cravate bleue et rouge caraco,
très peu Pierrot
et très peu Colombine
la môme Coquelicot
et son amant le Bluet
-croupe ronde et corps fluet-
s’en vont danser de folles chaloupées
au rythme sourd d’étranges mélopées.

La plaine est un billard anglais
aux trous nombreux et uniformes,
tels des verres à vin énormes
qu’un obus aurait ciselés.

Et des soldats écartelés
aux soirs de grande attaque, y dorment…
Combien de têtes ont roulé
dans ces trous, coupes énormes ?

Au milieu des plaines et sur les collines,
En cravate bleue et rouge caraco,
très peu Pierrot
et très peu Colombine
la môme Coquelicot
et son amant le Bluet
-croupe ronde et corps fluet-
s’en vont danser de folles chaloupées
autour des trous et des têtes coupées."

 

Plaine de Vauquois, 1915.
Jean Arbousset
Sources: Le livre de Quinze Grammes Caporal, Jean Arbousset, Editions de l’Arbre, juillet 2002.



Sources: Eggenspieler "Un régiment de réserve en Berry - Le 290eRI" Bourdier 1932 

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25 mai 2005

25 mai 1915 - attaque des Cornailles

Voici ce que le nouveau capitaine Carpentier rapporta de la prise des Cornailles:

25 mai. Le commandant Royné vient me voir
-Tout est prêt, me dit il? - Oui!
- Vous êtes sûr de vos hommes? Sur!
Bien je vous interdis de sortir le premier de la tranchée".
Je reste abasourdi.
-Pourquoi, mon commandant?
-Nos pertes en officiers sont énormes depuis trois semaines! Il faut absolument nous ménager pour durer!
-C'est très joli, mais au moment de l'attaque tous les hommes auront les yeux sur moi, et s'ils voient que je ne sors pas et qu'ils ne sortent pas"?
Le commandant est parti. Attendons, on verra bien.
A midi, je parcours une dernière fois ma tranchée.
Les échelles de franchissement sont préparées.
Tout le monde est à son poste.
On n’emporte pas le sac, mais seulement la toile de tente en sautoir, avec deux jours de vivres.
Les hommes assujettissent leurs baïonnettes, disposent leurs masques à gaz.
Midi 10. C’est l’heure. La section de gauche doit partir la première. Et cependant personne ne sort. Que se passe t il ?... Soudain, un homme parait debout sur le parapet. C’est le caporal Birk. Son drapeau de signaleur épinglé dans le dos, il court vers la tranchée suivi de toute la section. Il arrive à son but et est tué sur le parapet".

L’objectif sera atteint a midi 20. Toute la partie est des Cornailles est aux mains du 90e RI

Sources: Général Marcel Carpentier "Un cyrard au feu" Berger Levrault 1964

24 mai 2005

Attaque aux gaz sur le 290e

Le 24 mai 1915, le 290e RI subit une attaque aux gaz, alors qu'il se trouve dans le secteur nord-est d'Ypres, dans le secteur Lizerne, Boesinghe.

Voici ce qu'en rapporta le colonel Eggenspieler, chef de corps du 290e RI

A 2 h. 45, on voit deux fusées rouges partir d'un ballon captif allemand dans la direction de Saint-Julien. Peu après un nuage opaque de couleur jaune-verdâtre s'élève en avant des tranchées allemandes. Le vent qui souffle dans notre direction chasse les nuages vers nous. Le Lieutenant Poirier qui commande le 6e bataillon donne aussitôt l'alarme. Il prescrit de mettre les masques. Ce sont à ce moment de simples tampons glycérinés qu'on doit tremper dans l'eau et les appliquer sur la bouche et le nez. A défaut d'eau on devait se servir d'urine. Ceux qui n'avaient pas de masques devaient prendre leur mouchoir et l'imbiber comme les masques.

Le nuage passe sur la première ligne sans occasionner un grand malaise aux occupants. Les gaz glissent ensuite vers le canal par le terrain incliné où se trouvent les deuxième et troisième lignes. Leur effet est plus sensible dans cette région. Des officiers et des soldats sont fortement incommodés sans avoir toutefois de lésions graves sur le moment. Le sous-lieutenant Devilliers qui accompagnait le Commandant de Lacombe toussait et crachait le sang. Au-dessus de l'eau du canal les gaz se dissipent assez rapidement.

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gaz

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Vers 3 heures un bombardement violent se déclenche sur tout le secteur. Les projectiles tombent partout et ils sont de gros calibre. Le Commandant de Lacombe a ramassé tout près de lui un culot de 280.

La 20e compagnie se porte en avant en renfort de la première ligne.

Une violente fusillade se fait entendre sur la droite devant les Anglais. La Brigade fait connaître que ceux-ci viennent d'être attaqués et qu'ils ont perdu du terrain. Etant donné l'orientation générale des lignes, la situation chez les Anglais intéressait vivement le régiment. En effet, nos tranchées faisant face au Nord et celles des Anglais étant face à l'Est-Nord-Est, si celles-ci tombaient, le régiment était pris à revers. Le Commandant de Lacombe voyant des Officiers anglais revenir des tranchées leur fait signe d'approcher pour leur demander des renseignements, mais il est impossible de s'entendre. Les Anglais, dont un est blessé, comprennent cependant qu'on leur offre de la gnôle. Ils en prennent un coup et continuent leur chemin. Peu après, d'autres Anglais, une centaine, quittent aussi leurs tranchées et se sauvent sans armes vers Saint-Jean. Heureusement qu'à ce moment des renforts anglais arrivent. Ils s'avancent en colonnes par quatre sous les obus qui font de larges brèches dans leurs rangs. Ils se rangent en chantant au bord de la tranchée, puis ils y descendent et la situation est rétablie.

A 10 heures les Anglais nous signalent des rassemblements allemands derrière la côte 29. Comme ils n'ont plus de liaison avec leur artillerie ils nous demandent de faire tirer pour. eux. Malheureusement à ce moment notre Officier observateur (Lieutenant Bergeron du 49e R.A.C.) est tué par un obus en même temps que le sous-lieutenant Devilliers. Ils se trouvaient tous deux dans l'abri du Commandant de Lacombe; ce dernier n'a échappé à l'obus que grâce au hasard qui l'a fait appeler au téléphone.

Quand les communications avec l'artillerie furent rétablies, celle-ci tira sur les rassemblements allemands, mais modérément, le ravitaillement en munitions n'ayant pas eu lieu la veille.

A 13h.30 une trentaine d'Allemands sortent de leur tranchée. Ils sont formés en lignes de tirailleurs fortement espacés et s'avancent résolument vers nos lignes. Ils croient sans doute nos hommes asphyxiés et n'avoir plus qu'à nettoyer la tranchée. Ils vont être fixés tout de suite. La 23e devant laquelle ils se présentent ouvre le feu et les arrête net. L'un des Allemands s'enflamme et brûle comme une torche. Il devait faire partie d'une équipe de lance-flammes. En même temps que s'effectuait cette sortie des obus toxiques tombèrent un peu partout sur le secteur. Aux points où les obus éclataient la terre devenait jaune, les capotes des soldats devenaient vertes, l'urine devenait rouge.

Entre 15 et 16 heures de la cavalerie allemande est signalée en avant des Anglais à l'Ouest de Saint-Julien. D'autre part les Anglais nous signalent de nouveau des rassemblements ennemis vers les côtes 27 et 29 et nous demandent de tirer. De son côté, le Lieutenant Poirier a aperçu des cavaliers portant des uniformes bleu horizon et semblant se diriger vers nos lignes et celles des Anglais. Poirier en a conclu que ce devait être des cavaliers allemands déguisés.

Dans cette journée du 24 l'attaque principale des Allemands a porté sur les Anglais à notre droite. Les tirs et les tentatives dont nous avons été l'objet semblaient n'avoir été que des mesures de neutralisation sur les ailes du front attaqué. C'était conforme aux procédés d'attaque des Allemands.

Dans la soirée nous apprenions que le Général de Brigade Cherrier était nommé au commandement de la 152e D.I. Le Général Joppé reçut le commandement d'une D.I. territoriale.

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Un peu plus de détails, sur les attaques aux gaz: La Guerre des Gaz

Sources: Eggenspieler "Un régiment de réserve en Berry - Le 290eRI" Bourdier 1932

22 mai 2005

Capitaine à 20 ans

"22 mai 1915– 6 heures du matin. Je viens à peine de m’endormir, après avoir veillé toute la nuit. Je perçois cependant une main qui soulève la toile de tente de mon abri. « Le lieutenant est là ? » Je ne réponds pas. J’ai cependant bien reconnu la voix de mon cher commandant Royné qui est un père pour moi. Mais que diable, il sait bien que nous sommes éreintés. Quelle idée de venir me réveiller au moment où je puis prendre quelque repos ! Je ne bouge. Mon agent de liaison a répondu. « Le lieutenant dort ! – Réveillez le et dites lui que j’ai besoin de lui parler. » Quelle barbe ! Pas moyen d’y couper. Je me lève hargneux et sors. Le commandant Royné est là, dans sa capote aux poches multiples, la pipe aux lèvres, souriant, me regardant de son petit œil fin. « Bonjour mon capitaine, » me dit-il. Qu’est ce qui lui prend ? Bonjour mon commandant, répondis je. « Mes félicitations, mon capitaine. » Et devant mes yeux énormes, il ajoute : Mais oui, vous venez d’être nommé capitaine, et j’en suis bien heureux. Moi aussi : vingt ans et deux mois. Un record. C’est sportif. Ce sont mes parents qui vont être contents.

Et maintenant, dit le commandant Royné, allez dormir.

Mais je n’en ai plus envie. Maintenant ce sont mes camarades qui viennent me féliciter et mes officiers et mes hommes, tous mes hommes qui à leur tour viennent mes serrer la main. Comme ils ont l’air vraiment heureux tous ces braves gens. Mais voilà Aubert qui m’appelle. Je sors et je trouve dans la tranchée mes trois officiers, Aubert, Massé, Mesnard, et quelques sous-officiers et hommes. Sur le parapet, ils ont cueilli des coquelicots et des bleuets et me les offrent. Je suis terriblement ému et ne trouve rien à dire. Une photo fixe à jamais ce souvenir si émouvant (trois jours après, Massé et Mesnard étaient tués)".

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Sources: Général Marcel carpentier "Un Cyrard au Feu" Berger Levrault 1964

18 mai 2005

304e brigade - prise des tranchées de Lizerne

De retour de manière précipité en Belgique, les 268e et 290e RI, formant la 304e brigade, prennent secteur au nord-est d'Ypres.
D'abord affectés à la 153e DI, ils passent ensuite en support de la brigade Cherrier (brigade coloniale).
Après une tentative échouée, le 27 avril en direction de Lizerne, les deux unités indriennes attaquent à nouveau:

"L'artillerie devait commencer sa préparation à 14
heures. L'infanterie devait déboucher à 15 heures. Pour faire une bonne préparation, l'artillerie avait placé un Officier observateur dans la tranchée de départ. Il était relié aux batteries par un fil téléphonique.
A 14 heures, les batteries se mirent à taper avec vigueur sur les tranchées allemandes, sur Lizerne, et sur le chemin de Lizerne à Steenstraat. Elles canonnèrent également une grande bâtisse qui dominait tout le terrain au delà de la route de Boesinghe, et qu'on appelait la Maison du Collège.
Les Allemands ne ripostent pas pendant notre préparation, c'est-à-dire qu'ils ne font pas de contre-préparation sur nos tranchées, c'est leur tactique. Ils se réservent pour le moment où l'attaque débouchera. Ils envoient toutefois des obus de gros calibre en arrière de Zuydschoote où ils soupçonnent qu'il peut y avoir des rassemblements de troupes.
Je me suis établi dans la tranchée où j'étais la veille au sud-ouest de Zuydschoote. Les territoriaux occupent toujours la tranchée et je prends place parmi eux. Nous sommes fortement secoués par les gros obus qui n'éclatent pas, ou qui éclatent trop profondément. J'avais avec moi le sous-lieutenant Devilliers et un téléphoniste.
A 15 heures justes, le tir de notre artillerie s'arrête. Il s'établit un silence impressionnant, pendant lequel les Officiers suivis de leurs hommes sautent sur la route. Ceux qui ont le derrière trop lourd sont poussés par les zouaves. Et en avant, les vagues se précipitent vers les tranchées allemandes. Toutes les compagnies se portent en avant, même celles du 5e bataillon. Le spectacle est si beau, qu'un certain nombre de territoriaux qui gardent les tranchées partent aussi. Un sous-officier d'artillerie de liaison est empoigné également. Il lâche son appareil téléphonique et se précipite en avant. Il n'a pas d'arme, il cognera sur les Allemands à coups de poing et de pieds.
Les deux premières lignes de tranchées allemandes sont enlevées d'un seul élan. A la troisième ligne le tir de représailles allemand se déclenche. Les fusils, les mitrailleuses, le canon, tout crache à la fois. Une véritable nappe de balles passe sur la tranchée où je me tiens. De temps à autre je risque un coup d’œil. Impossible de rien distinguer de l'attaque. Tout le terrain était couvert d'une épaisse couche de fumée et de poussière. C'est dans cette atmosphère que se passent alors les combats singuliers qui se produisent à la fin des attaques d'ensemble. En fin de compte, sur les trois lignes enlevées nous en avons conservé deux. Et si nous n'avons pas gardé la troisième, et si nous ne sommes pas allés d'emblée jusqu'au canal, cela tient à ce qu'au Sud de Lizerne nous avons été seuls à sortir de nos tranchées. Comme la veille aucune troupe n'avait débouché, ni à droite, ni à gauche. Du côté de Lizerne nous avons continué à être pris d'enfilade par des mitrailleuses qui étaient restées dans la partie Est du village. Comme nous étions également découverts sur notre flanc droit, les Allemands sont revenus occuper les tranchées qu'ils avaient abandonnées.
En fin de combat, les deux compagnies de tête occupaient la deuxième ligne allemande, les deux compagnies suivantes la première, et les deux compagnies du 5e bataillon la tranchée de départ, autrement dit, la tranchée de première ligne française. Toutes les compagnies travaillèrent activement à organiser le terrain conquis. La 24e notamment creusa une tranchée à droite pour parer à toute attaque de flanc dans cette direction. Les mitrailleuses qui arrivent à leur tour sont mises en position sur les deux flancs.
Nos prises au cours de l'attaque furent de 87 prisonniers dont 2 Officiers. Les Allemands avaient abandonné de nombreuses armes dont 2 mitrailleuses. Pas mal de prisonniers s'étaient échappés par les deux ailes et n'avaient pas été dénombrés au compte du régiment, qui avait cependant été le seul à attaquer.
Vers 19 h. 30, un ordre de la Brigade prescrivit de poursuivre sans interruption l'attaque, pour rejeter définitivement au delà du canal les Allemands qui paraissaient à bout. Si les Allemands étaient à bout nous ne l'étions pas moins. Sur 15 Officiers qui avaient pris part à l'attaque 9 étaient hors de combat. Le Lieutenant Fougère avait été tué, les Sous-Lieutenants Tournier, Moinault, Poirier, Matignon étaient blessés. Le Sous-Lieutenant Tournier avait une blessure particulièrement grave. Une balle venue de côté lui avait emporté le menton. Des maîtres-chirurgiens ont réussi à le guérir longtemps après la guerre. Les compagnies du 6e bataillon qui avaient bien encore perdu 200 hommes étaient hors d'état de recommencer une nouvelle attaque, et les deux compagnies du 5e n'étaient pas suffisantes pour pousser jusqu'au canal. Pour avancer encore, il eût fallu que nous eussions les flancs couverts. Il eût surtout fallu qu'à gauche on nous débarrassât des damnées mitrailleuses de Lizerne. L'ordre de la Brigade recommandait une infiltration par petites attaques à la baïonnette plutôt qu'une opération en masse. Evidemment le Commandement après la première attaque n'avait plus les moyens d'en monter une deuxième. Pour finir, il n'y eût pas plus d'actions de détail que d'ensemble. Cela se produira encore plus d'une fois dans ce secteur".
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Sources: Eggenspieler "Un régiment de réserve en Berry - Le 290eRI" Bourdier 1932

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13 mai 2005

Le corps de l'ennemi ...

Alors que les 68e et 90e RI (17e DI) se battent aux alentours de Loos en Gohelle, les 268e et 290e RI, eux combattent en Belgique.

En effet, ces deux derniers régiments au sein de la 152e DI avaient quitté la terre de Belgique début avril mais le 24 du même mois, ont été rappelé en urgence suite à l'attaque chimique du 22 avril sur le secteur de Steenstraete - Lizerne.
Ils allaient y rester jusqu'à fin août.
Nous aurons certainement l'occasion d'y revenir.

En ce jour, il y a 90 ans, voici ce qu'écrivait Raymond Rollinat dans son journal concernant les conditions de combats du 290e RI.


Jeudi 13 mai (jour de l’ascension).

« Ernest Baudet, fils de mon domestique Charles Baudet, sergent réserviste au 290e de ligne avait été nommé adjudant à la suite d’un combat ; il n’a pas accepté ce grade pour ne pas changer de compagnie, voulant rester avec ses nombreux camarades.
Son bataillon s’est battu pendant 22 heures de suite. Il est tombé un nombre important d’Allemands entre les lignes et il est impossible de les enterrer tellement des deux côtés on fait bonne garde. Ces corps sont entrés en putréfaction et E. Baudet réclame à ses parents du camphre, de l’alcool de menthe pour atténuer l’odeur et calmer les nausées occasionnées par les émanations épouvantables qui se dégagent de tous ces cadavres sans sépulture.
Quel spectacle et quel supplice pour les soldats qui restent pendant des jours et des nuits à proximité de ces champs de carnage. Le proverbe qui dit que le corps d’un ennemi sent toujours bon, n’est pas de mise en ce moment dans la contrée d’Ypres où se trouve notre brave 290e ».
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Sources : Argenton 1914-1918 Raymond Rollinat – Editions Guénégaud Paris
19 avril 2005

Instants de repos

Serait ce l'effet du printemps mais tout le monde a besoin de repos.
Depuis un certain temps le 9e CA a été retiré des lignes et essaye de se recontituer avant les prochaines offensives que tout le monde annonce pour les semaines a venir.
Les pertes ont été telles, que comme l'indiquait le colonel Eggenspieler, la composition du 290e RI a changé voir fil précédent du 25 mars.

A ce titre, en 2005, pour moi aussi (mais bien sûr à un degré nettement moindre) les vacances si méritées arrivent, les rebondissements de la quinzaine à venir seront repris ultérieurement, de plus je profiterais du calme du Berry pour mettre à jour le fichier des Morts Pour La France. En effet, quelques 1003 fiches attendent d'être entrée en base.
Bref des vacances studieuses,...

En attendant, laissez moi vous présenter celui à qui devons le détail du parcours du 290e RI:

Le colonel Eggenpieler

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11 avril 2005

Maurice Laurentin, arrivée au 268e

Qu’avait donc Maurice Laurentin pour retenir mon attention ?
D’abord qui est il ? Originaire de Cholet, architecte de formation, il a d’abord été mobilisé au sein du 77e RI, puis suivant son chef de corps, le lieutenant colonel Mariani, il est affecté au 268e RI du Blanc le 12 avril 1915.
Il est auteur de deux excellents témoignages intitulés « Le sang de France » et « La victoire des Morts ». Jean Norton-Cru qui lui reprochait un récit « lestement conté » et « une psychologie du combattant guère poussée », lui reconnaissait cependant une certaine valeur.

De plus, après quelques recherches, un jour nouveau m’apparaissait. La découverte de son œuvre combattante se fit par l’intermédiaire de l’achat d’un volume intitulé « Carnet d’un fantassin de 1914 », qui se révélait être la compilation des deux volumes précités. Ce volume a été édité en 1965 aux Editions Arthaud.

Ma surprise fut de découvrir que la préface était de Ménie Grégoire. Que venait faire Ménie Grégoire dans un livre sur 14-18? En vérité, cette dernière se révélait être la fille de Maurice Laurentin, Marie Laurentin (dite Ménie) épouse Grégoire.

Après guerre, Maurice Laurentin redevint architecte, une de ses principales réalisations fut l' Eglise Sacré Coeur de Cholet.

Pour le plaisir des yeux, une illustration de l'auteur, glanée dans les "carnets d'un fantassin de 1914":

 

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7 avril 2005

Déplacements et revues dans le Nord

Toujours affecté à la 18e DI, après avoir quitté les premières lignes, le 290e RI se reconstitue et périgrine d'étapes en étapes à travers le Nord de la France.

Le 6, on se remit sur les routes pour gagner les environs de Saint-Pol. Le soir nous cantonnions à Nieurlet et Ecarts. Le 7 à Ecques, au Sud de Saint-Omer, Nous avons fait une traversée complète de cette petite ville. Notre allure était déjà devenue bonne, à tel point que le bataillon de queue n'a pas pu suivre le bataillon de tête, dont l'allure a été accélérée par la cadence rapide des tambours et clairons.
Au Sud de Saint-Omer, le régiment suivi de son P.C. a défilé devant le Général Curé qui a été frappé de la transformation qui s'était opérée dans ma troupe depuis sa sortie des tranchées. Les hommes avaient tous bonne mine et il y avait de l'entrain dans leur allure. Mais ce qui a encore bien plus frappé le Général c'était la bonne tenue de mon convoi. Il s'est écoulé dans un ordre parfait, sans le moindre à coup, toutes les voitures à la même distance. Après le défilé, le Général ainsi que son Chef d’Etat-major, le Colonel Roux, m'ont adressé les plus vifs compliments pour la belle attitude du régiment. Le Général était visiblement très satisfait. Il a du reste confirmé dans un ordre écrit, les compliments qu'il nous a adressés sur le moment même.
Avant d'atteindre Ecques, le Général Lefèvre, Commandant la 18e D.I., a voulu nous voir à son tour. Je lui ai rendu compte du défilé que le régiment venait déjà d'accomplir devant le Commandant de Corps d'Armée, et des compliments que cet Officier Général venait de nous adresser. « Dans ces conditions, me dit-il, je ne pourrai plus que joindre mes compliments à ceux du Général Curé. » Il tenait malgré cela à nous voir passer devant lui. Il convint, en souriant malicieusement, que nos compliments étaient réellement mérités. Il reconnut dans la colonne le Sergent Bouchard, qui avait officié la veille. Il lui a adressé quelques paroles aimables. Pour terminer le défilé, il y eût un numéro qui a vivement amusé le Général. C'était la voiture du Vétérinaire de la Brigade, M. Sigonneau, qui marchait avec le régiment. Cette voiture était un cab anglais magnifique, dont on avait enlevé le siège extérieur du conducteur, M. Sigonneau voyageant assis à l’intérieur. du cab et conduisant de là. C'étaient nos éclaireurs qui avaient déniché ce véhicule dans une cour à Ypres, où soit disant son propriétaire, quelque grand Seigneur anglais, l'avait abandonné. Il nous a rendu service longtemps, jusqu'au moment où nous l'avons abandonné à notre tour, quand on s'est mis à faire la chasse aux voitures en surnombre.
Après Ecques, nous avons gagné Matringhem, dans la vallée de la Lys, par Thérouanne et Bomy, ensuite Humerœille et Bermicourt.
Le 10 avril, nous avons atteint Nuncq et Ecoivres, où nous devions nous arrêter pendant quelque temps.
Personnellement, je suis cantonné à Nuncq avec la C.H.R. et le 6e bataillon, le 5e bataillon est à Ecoivres. Je reçois de nouveau la visite du Général Curé. Il a une affection particulière pour ses vieux régiments Il me dit de nous installer à notre aise, comme pour un long séjour. Le Général veut nous faire oublier le dur hiver que nous avons passé au Bois du Polygone.

Sources: Eggenspieler "Un régiment de réserve en Berry - Le 290eRI" Bourdier 1932

5 avril 2005

Retour en France

En ce début avril 1915, le 290e RI comme le 9e corps d'Armée quittait progressivement la terre de Flandres pour aller se recontituer dans le nord de la France

Bambecque. - Le régiment s'est embarqué en camions autos à la sortie Ouest de Wlamertinghe. Il a pris le chemin de France par Elverdinghe, Poperinghe, Proven, les Cinq-Chemins. Il a débarqué à Bambecque, où il s'est installé. La localité était bien construite, et les habitants nous firent bon accueil. C'était un cantonnement propre à nous remettre de nos misères des tranchées. Les hommes se sont nettoyés. Ils ont coquettement organisé les locaux qu'ils occupaient. Nous avons eu la visite du Général Curé, qui avait succédé au Général Dubois, dans le commandement du 9e C.A. Il voulait se rendre compte de l'état de la troupe. Le Général avait un aspect dur, il avait la parole sèche et tranchante, mais il était bienveillant au fond et aimait ses régiments. A Bambecque, il a eu grand plaisir à questionner mes vieux soldats. Il a été étonné de leur physionomie de vieux guerriers et des réponses qu'ils lui donnaient. Ils lui ont déclaré nettement qu'ils continueraient à faire la guerre tant qu'il le faudrait. Pour finir, il a demandé à ceux qui étaient là depuis le début de lever la main. Il n'y en avait déjà plus beaucoup, mais c'était précisément ceux-là qui en voulaient encore.
L'installation et le nettoyage terminés, j'ai remis les compagnies sur les routes et dans les champs. Il s'agissait de reprendre une allure normale, et de se mouvoir lestement en terrain varié.
Bien nous en a pris de nous être dégourdis. A peine avions-nous entamé notre vie de redressement, que le Commandement nous a remis en marche, mais cette fois sans camions. Nous préférions cela. C'était la vie au grand air, avec les vieilles chansons de route et quelques airs populaires du Berry.
Avant de quitter Bambecque, nous avons groupé nos sections de mitrailleuses pour en former une compagnie.

Sources: Eggenspieler "Un régiment de réserve en Berry - Le 290eRI" Bourdier 1932

Le général CURE lors de son commandement de la 88e DIT en 1914:

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