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Indre 1914-1918 - Les 68, 90, 268 et 290e RI
2 mai 2020

Un capitaine castelroussin tombé à Montécouvé, Jules Barrault du 90e RI.

Il y a peu, je faisais part du projet de reconstruction du monument de l’Orme de Montécouvé, dans l’Aisne. Au moment où j'écris, je ne sais quand le projet aboutira, mais il aboutira (voir le lien) et il est important de souligner l’importance de ce monument et surtout les faits qui y sont liés. Je vous invite donc à découvrir au travers du message précédent ce que fut la dernière bataille des régiments de l’Indre.

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Général Dubail, Maréchal Fayolle, "La guerre racontée par nos généraux" (1920).

 En parallèle à ces événements et à cette publication, cette année, par l’entremise d’un message de Didier Bléron sur les réseaux sociaux, Jean-Marc Acolas de Châteauroux s’est présenté comme descendant du capitaine Barrault du 90e RI, ce qui tout de suite nous intéressa. Le capitaine Barrault, natif de Châteauroux, fit tout sa carrière au 90e et tomba lors de la bataille de Montécouvé. Son parcours mérite d’être repris ici.

 

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 Né en 1896 à  Châteauroux, le 26 avril, il est fils de Georges et de Madelaine Fragnet. Son père est vigneron et sa mère cigarière. Elle travaille donc à la Manufactures de Tabacs de Châteauroux. La famille habite alors rue du Four à Chaux à Châteauroux.

A partir de sa fiche matricule présente aux archives départementales de l’Indre, il est possible de retracer son parcours individuel

Alors déclaré comme cordonnier, au moment de son conseil de révision de mars 1907, il est classé dans la 3e partie, celle des engagés volontaires. Effectivement, depuis le 1er octobre 1906, il s’est engagé pour 3 ans auprès du 90e régiment d’Infanterie de Châteauroux. Le mois suivant, il intègre le régiment comme soldat de 2e classe. Il passe caporal en avril 1907 et sergent en 1908.

Le 8 décembre 1908, il contracte mariage à Châteauroux avec Augustine Bourgeois (24 ans)

En 1909, il se rengage pour 2 ans et il prolonge à nouveau de 3 ans en 1911. Lors de la mobilisation d’aout 1914, il est alors nommé sergent-major.

Du fait de ces capacités, de son expérience acquise, mais aussi afin de combler les trous dans les effectifs d’encadrement, il est choisi pour intégrer le corps des officiers. Au lendemain des lourdes pertes liées à l’engagement du 9 mai 1915, il passe donc au sein du 125e Régiment d’Infanterie (Poitiers) comme sous-lieutenant à titre temporaire (Décision ministérielle du 11 mai 1915). Le 125e RI est un régiment d’Infanterie du même Corps d’Armée que le 90e. Il rejoint d’ailleurs ce dernier en janvier 1916 et est nommé lieutenant à titre temporaire à compter de novembre 1916.

  Cité à l’ordre 46 du 01/12/1916 « Jeune officier courageux et dévoué qui s’était déjà distingué à Verdun. Commande très bien sa Cie de mitrailleuses. A fait preuve des plus belles qualités militaires pendant la période du 26/10/1916 au 01/11/1916 et celle du 4 au 7 novembre et a été un collaborateur précieux pour le Cdt de Bataillon. A fait spontanément la reconnaissance de la ligne nouvellement acquise pour placer ses pièces » Bataille de la Somme

Cité à l’ordre 26 du 26/08/1917. « Officier modeste mais de réelle valeur a contribué à la défense du secteur du Bataillon en recherchant des emplacements de pièces de mitrailleuses malgré la violence du bombardement » Bataille de l’Aisne Juillet 1917

Après des nominations à titre définitif courant 1917 et 1918, il passe capitaine en mai 1918. Il commande alors la 1ère Cie de Mitrailleuses.

A propos de la disparition du capitaine Barrault, reportons-nous sur le Journal de Marche et Opérations du 90ème Régiment d’Infanterie. On y lit:

24 août 1918 :
Ordre du jour du Colonel DETANGER : « La position de Montécouvé est une position de toute 1ère importance. Le régiment a le devoir et l’honneur de le conserver. »
L’ordre est donné de consolider la position, de talonner l’ennemi à la grenade et d’atteindre les objectifs : Crécy-au-Mont – Juvigny.
L’ennemi veut tenter encore une fois la chance. A 6h du matin, après une forte préparation, il se lance à l’assaut. Un instant, les éléments avancés du régiment cèdent du terrain, mais avant que l’ennemi ait pu s’installer sur la position le III/90 (Bataillon de soutien) réagit avec une belle promptitude que la position est reprise et dépassé. 4 prisonniers sont capturés dont 2 sergents et 1 unterofficer. De nombreux cadavres allemands sont restés sur le terrain. L’Orme de Montécouvé est en notre possession complète.
Le Capitaine LEBLANC (10e Cie) a été blessé. Le Chef de Bataillon GODARD (III/90) est proposé pour officier de la Légion d’Honneur.

25 août 1918 :
Ordre d’attaque pour la journée
Objectif : 0369 – tête du ravin des Ribaudes – plateau situé à 400m Est de la Cote 159.
Forte préparation d’artillerie, barrage roulant : 100m en 3 minutes. Heure H 10h 5
En ligne : II/90 à gauche, I/90 à droite. La progression se trouve arrêtée à la tranchée de Cardiff. 45 prisonniers restent entre nos mains dont 1 lieutenant et 1 stellevertreler. L’Aspirant PHILIPPE de la 2e Cie se distingue particulièrement. Il bouscule l’ennemi à la grenade dans la tranchée de la Ferme de Montécouvé, fait de sa main 3 prisonniers dont 1 officier et, aidé du Sergent GOURON de la 3e Cie tue 4 Allemands.
Pertes : Le Sous-lieutenant MOTTEL de la 11e Cie et le SLtn MOUDDEY de la 9e ont été tués. Le Lieutenant ROUSSEAU (10e) est blessé ainsi que les Sous-lieutenants MASSIES (10e), BELLET (11e) LECAIN (11e) JEAGER (7e) SABLEAUX (1ère Cie). L’Adjudant-chef téléphoniste BAUBY tué à la ferme de Mareuil. Disparu : Le Capitaine BARRAULT (CM1) dont la tombe a été retrouvée après le recul ennemi.

Le régiment, très éprouvé, est relevé dans la nuit du 25 au 16 août par extension du 339e RI (64e DI) Il est rassemblé aux environs de la Ferme Saint-Léger (Ravin de Vézaponin, champs des Lattes). Stationnement en bivouac, formation largement échelonnée.

Le JMO a été écrit après coup par le rédacteur, pas au plus fort de la bataille. La sépulture avait été retrouvée, dès le retrait des troupes allemandes. Le corps fut inhumé par les soldats allemands ou du moins, les prisonniers français aux mains des Allemands.

Ceci nous l’apprenons par le biais d’un courrier que la famille possède encore actuellement. Voici l’extrait dune copie d'un courrier expédié du Dorat (Haute-Vienne) le 26 novembre 1918 par un nommé A. ou G. IMBERT pour la veuve de Jules BARRAULT et qui écrit : " ... Je dus, sous la menace des boches creuser la fosse et enterrer celui qui avait été plutôt un ami qu'un chef. Je l'ai enterré dans un bois dont j'ignore le nom en face du poste de secours. Une croix a été posée sur sa tombe avec l'inscription : capitaine Jules Barrault, 90ème régiment d'infanterie. Il me serait très facile de montrer l'endroit exact de la tombe, quant à indiquer le nom, je ne le puis. Fait prisonnier et emmené en captivité, je n'ai pu vous avertir. Il m'était impossible d'écrire à ma famille et je ne pouvais donc pas vous annoncer combien il m'avait été pénible de voir mourir mon chef. Malgré la peine, j'ai dû sous peine de coups, jeter la terre sur le corps de mon pauvre capitaine ... ".

Imbert ne sut pas de suite que la sépulture fut retrouvée, étant captif. Une fois libéré, il informa la famille de « son » capitaine. 

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Photo cimetière provisoire de Montécouvé

Retrouvée, la dépouille fut-elle laissée sur place ? Fut-elle transférée au sein du cimetière provisoire de Montécouvé ? Toujours est-il que le corps fut rapatrié à Châteauroux le 21/06/1922 à la demande de madame Barrault Veuve, demeurant 32, rue de la Brauderie à Châteauroux.

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Sources AD36 – 791W120 37e Convoi

Autre élément disponible, 

La fiche « Mémoires des Hommes » du « Ministère des Pensions, des Primes et des Allocations de guerre » d’alors :
https://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/fr/ark:/40699/m00523a049850303/5242c0eebe1ca

Jean Marc Acolas m’a confirmé que la sépulture est toujours présente au cimetière Saint-Denis. De plus, il m’a transmis l’information suivante. La famille possède toujours le sabre et le képi de grande tenue du capitaine Barrault, ainsi que diverses affaires du capitaine Barrault. Fait remarquable, la doublure du képi contient encore de nos jours des feuilles qui furent trouvées sur la sépulture originelle.

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Cliché Jean Marc Acolas

A titre posthume, le capitaine Barrault fut décoré de la Légion d’Honneur au grade de Chevalier et se vit décerné la Croix de Guerre avec Palme
Son nom figure sur le monument aux morts de la ville de Châteauroux, ainsi que sur le livre d’Or communal.

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Monument aux morts Ville de Châteauroux
Cliché Huguette Mauduit

 

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Livre d’Or de la ville de Châteauroux
Archives Nationales - FRDAFAN85_OF9v078666


 

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