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Indre 1914-1918 - Les 68, 90, 268 et 290e RI
14 juillet 2022

Fêtes de la Victoire, le 14 juillet 1919 à Argenton et Clion

Après le conflit, vient le temps des commémorations, de la joie du retour des soldats, de la peine du retour des défunts. Les soldats survivants seront progressivement démobilisés entre novembre 1918 et juin 1920 pour les classes les plus "jeunes". Sur ce blog, nous avons déjà abordés le retour des unités par le biais du retour du 90e RI à Châteauroux le 24 août 1919. Concernant les défunts, des retours de corps furent organisés dès 1921, sous la pression des demandes de famille.

Cet été 1919 fut un long chemin mémoriel menant à ce retour. 6 mois sont passés et on fédère la population autour des soldats survivants, mais aussi autour de ceux dont ont fait le deuil.
Dans le cadre d'un autre message, nous avions évoqué les Fêtes de la Victoire qui se tinrent dans les communes avec pour exemple l'analyse des clichés du 3 août 1919 à Martizay.

Martizay: Fêtes de la Victoire, le 3 aout 1919 (Réactualisé 2020)

Aujourd'hui, je souhaite m'intéresser au premier volet de ces Fêtes de la Victoire qui se tinrent le 14 juillet 1919.
La Fête Nationale sert alors de moment de rassemblement autour des soldats et de l'armée française, tout en restant une fête populaire "traditionnelle", au contraire du 3 août 1919 plus réglementaire et plus mémoriel.

Pour débuter,  voici un cliché issu de ma collection personnelle et concernant Clion et sa version du 14 juillet 1919.
Alors qu'à Paris, le grand défilé de la Victoire est organisé et voit les troupes victorieuses défiler à l'Arc de Triomphe et sur les Champs-Elysées, dans les petites villes des défilés populaires sont organisés.

Une simple photo datée du 14 juillet 1919 à Clion (Indre) et son pendant actuel. La place présentée fut celle où le Monument aux Morts fut érigé. La décision de cette érection est validée par la commune dès juin 1919.

127229069

Intéressons-nous maintenant à Argenton et aux clichés Rollinat. Pour cela, j'ai repris 4 clichés de Raymond Rollinat illustrant cette journée. Ces clichés permettent de visualiser l'implication de la population argentonnaise et d'aussi visualiser  divers éléments de la ville d'alors. 
Au fil de la journée, je compléterai donc le message en retranscrivant l'intégralité de ce qu'écrivit Raymond Rollinat en cette journée dans ses carnets et qui permettront de comprendre le contexte tant ses carnets sont détaillés. Je me limite donc volontairement à une explication sommaire du contexte argentonnais d'alors.


Montage1

 


Lundi 14 juillet.
cette nuit +5° soleil et nuages A midi, à l'ombre +21° A midi, pluviométrie Eau= 0,0
C'est aujourd'hui la fête de la Victoire. La population d'Argenton saura montrer son patriotisme. A 6h du matin, salve des canons de la ville. Dès 9h30, les sociétés et groupes se rassemblent sur la place de la République et se forme le cortège qui ira se rendre au cimetière pour honorer les morts des deux grandes guerres.
A 10h départ. En tête la compagnie de sapeurs pompiers, ses tambours exécutent les roulements funèbres réglementaires. Les enfants des écoles communales, ceux des écoles libres, conduits par les instituteurs et institutrices; les mutilés conduits par le président d'honneur, M. Fernand Gautier, capitaine de la Territoriale, chevalier de la Légion d'Honneur, décoré de la Croix de Guerre et 2 fois blessé, son président M. Jules Auclair, atrocment mutilé, son vice-présidentM. Auclair avec ses deux yeux de verre. C'
est avec émotion et respect qu'on voit passer nos jeunes hommes aux jambes de bois, aux bras artificiels rigides, malgré les progrès de la science orthopédique et facilement reconnaissables. Le drapeau de l'ancienne société de tir et de gymnastique, celui que nous avions, nous les vieux, dans notre jeunesse, du temps de feu M. Pierre Juillet, maire qui l'offrit et de mon regretté ami Paul Herpin qui dirigeait cette société. ce vieux drapeau voilà de crèpe est porté et encadré par les jeunes gens du groupe d'instruction et d'entrainement physiques d'Argenton.
M. Paul Hautreux, conseiller municipal faisant fonctions de maire, ayant près de lui M. Labruère, conseiller général du canton d'Argenton et président du conseil général de l'Indre et suivi de la fraction du conseil municipal non démissionnaire, tous les fonctionnaires , la gendarmerie, etc ... formaient un groupe qui précédait les pères, mères, veuves et enfants des soldats de la commune d'Argenton morts pour la France. Puis venaient les sociétés des combattants de 1870-1871, des vétérans des armées de terre et de mer avec leurs drapeaux voilés de crèpe; la société de secours mutuels et les autres sociétés de notre ville, les soldats permissionnaires et les soldats démobilisés; plus de 3000 personnes suivaient.
La magnifique couronne offerte par la ville aux morts de la guerre 1914-1919 et la superbe palme, aussi offerte par la ville aux morts de la guerre 1870-1871 étaient portées par les mutilés ou plutôt entre le drapeau de la société de tir et de gymnastique et le groupe de mutilés.
Au cimetière, MM. Paul Hautreux, Joseph Labruère et Fernand Gautier prononcèrent des discours. Ils parlèrent de l'effroyable guerre qui vient de se terminer par notre victoire, de nos morts, de nos blessés, de la bravoure, de la ténacité de nos admirables soldats, de nos alliés, de nos devoirs pendant les longues années qui vont suivre. Je me trouvais près du groupe des parents des morts et j'entendais les sanglots des mères et des veuves, je voyais les larmes couler sur la face des pères de ceux qui ne reviendront plus.
La couronne fut placée sur la croix de de la tombe du centre de la partie réservée aux morts de la guerre qui vient de se finir; la palme fut accrocher au monument élevé à la mémoire de nos morts de 1870-1871
La foule, recueillie, émue autant qu'il est possible de l'être se retira lentement du champ du repos.Je crois qu'Argenton ne vit jamais cérémonie plus imposante. Quoique cette cérémonie n'ait aucun caractère religieux, M. le curé d'Argenton y assistait; il était près du groupe des parents des morts.
Dans la matinée, à la mairie, du pain avait été distribué aux indigents et il y avait un concours de tir pour les jeunes gens deu groupe d'instruction et d'entrainement physiques, aprsè les devirs rendus aux morts, les jeunes gens continuèrent le concors de tir.
A 1h30, allant vers le Nord, passe un train de voyageurs et à marchandises, vides et en grande partie démolis
Au train de service de 3h47, un wagon de soldats français armés et équipés.
De 3 à 4h30, courses de bicyclettes au champ de foire; foule énorme; balançoires, chevaux de bois, loteries sur les promendes et le champ de foire. A 4h30, concours de bicyclettes fleuries, défilé en ville et au champ de foire, c'est Mlle Germaine Tissier, ma voisine qui a remporté le 1er prix. A 6h, place de la République, mat de cocagne. La musique d'Argenton s'est fait entendre au cimetière, au champ de foire et sur la place de la République. La musique dans la matinée avait attendu le cortège au cimetière et avait joué une marche funèbre ...
Dans la soirée, illuminations et concert sur la place de la République; la musique joue ses plus brillants morceaux et les enfants des écoles chantent des airs patriotiques. Jamais la place de la République n'a été aussi bien illuminée. La façade de la mairie, le kiosque resplendissent de feux [illisible] des guirlandes d'ampoules électriques traversant une partie de la place, face au Pont-Neuf et à la rue Gambetta. nombre de maisons sont illuminées à l'électricité et à l'aide de lanternes vénitiennes dans la plupart des cas. Foule énorme au concertsur la place, ensuite les [illisible] se rendent aux Promenades, brillamment illuminées à l'électricité et aux lanternes multicolores en papier; on se bouscule aux loteries, aux chevaux de bois; par sacs, les confettis sont lancés sur les promeneurs. Au restaurant du champ de foire, la jeunesse danse.
Il a été impossible de se procurer un feu d'artifice, mais sur le champ d efoire, des tubes fortement chargés lancent des bombes qui éclatent en l'air. Pendant la plus grande partie de la nuit, les tapage dure. Les parents des morts de la guerre étaient pour la plupart restés chez eux."

Ensuite, Raymond Rollinat note des nouvelles de France et du Monde.

 

Le premier cliché:
Place de la République, le bâtiment des Docks du Centre qui deviendra bientôt le nouveau bureau des Postes a subi un incendie l'année dernière, la toiture a complétement disparue. Le kiosque de musique est visible sur la droite, il sera remplacé par le Monument aux Morts, décidé en 1920 et inauguré en 1922.
Aucun soldat n'est visible sur le cliché (contrairement au 3 août 1919 à Martizay). Sur les 13 plaques photographiques existantes de ce moment, trois soldats "bleu horizon" seulement sont visibles. Les drapeaux sont ceux des associations patriotiques locales et donc portés par des "civils, soit anciens combattants, soit mutilés démobilisés. La couronne de fleurs est identifiée comme étant portée par les mutilés démobilisés. Elle sera déposée au cimetière d'Argenton en hommage aux combattants.

Le deuxième cliché:
Au cimetière communal, après avoir déposer les fleurs et couronnés au pied du monument 1870-1871, les civils viennent fleurir les tombes de soldats décédés qui sont regroupées dans ce qui sera le futur carré militaire du cimetière d'Argenton.

Le troisème cliché:
Au devant de l'ancien hôtel de vielle et actuel siège du syndicat d'initiative (et du Cercle d'Histoire d'Argenton) sur la place de la République, les 6 candidates au concours de bicyclettes fleuries

La quatrième cliché:
Sous les ombrages de la place du champ de foire, la foule regarde et encourage les coureurs dans la ligne droite traversant le champ de foire. 

 

DSCN1345
Mlle Germaine TISSIER, 1er prix du concours de bicyclettes fleuries du 14 juillet 1919

 

Merci au Cercle d'Histoire d'Argenton pour la mise à disposition des clichés. J'invite les personnes intéressées à se procurer le fascicule "Argenton sur Creuse 1914-1918 La guerre au jour le jour" auprès du Cercle d'Histoire d'Argenton

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